Découvrir le GR® 42 : en Ardèche, de Saint-Péray à Le Pouzin

Cette invitation à marcher sur le GR® 42 tombe à pic car elle va me permettre de compléter ma connaissance des itinéraires pédestres de ce département que j’ai eu la chance d’habiter quelques temps. Plus au nord, c’est l’Ardèche Verte, qu’on a déjà bien évoquée dans Carnets de Rando. Plus au sud, c’est l’Ardèche Méridionale, bien quadrillée elle aussi. Me voici donc entre les deux, à naviguer entre Saint-Péray et Le Pouzin dans ce nouvel épisode. Sur ma route, Crussol et son château, que je me languissais de découvrir pour le blog depuis des lustres. Puis des inconnues, réduites à des noms sur une carte : Toulaud, Beauchastel, La Voulte et Le Pouzin. Ces noms ne vous disent rien ? Un court séjour sur le GR® 42 devrait suffire pour, tout comme moi, corriger cette lacune ! Regardez !

Difficulté : moyen | Longueur : 58km | Durée : 3 jours | Dénivelé : 2065m

Si mon reportage démarre au belvédère du Roc de Saint-Romain-de-Lerps, cela fait en revanche quelques kilomètres que le GR® 42 a commencé sa route à travers l’Ardèche. En venant de Saint-Etienne et après avoir traversé le Pilat, l’itinéraire entre en effet dans le département par le Haut-Vivarais. Depuis Saint-Romain, la vue porte loin et appelle à l’aventure. D’un côté les monts d’Ardèche, verdoyants sous les assauts fleuris du printemps, de l’autre la lumineuse vallée du Rhône, qui se perd dans le flou ensoleillé du début de journée, surmontée par les reliefs du Vercors, annonciateurs des Alpes toute proches. Mais c’est vers le sud que vont nous porter les balises du GR® 42. La prochaine étape du parcours, c’est Crussol et son incontournable château.

Fier sur l’extrémité de son piton rocheux, le château de Crussol affiche des siècles d’histoire en trônant au-dessus de la vallée du Rhône. Battu par le souffle épique de son passé tumultueux, il invite le randonneur à un beau saut dans le passé

Après une descente vers Saint-Péray, il va falloir s’affranchir d’une grimpette soutenue vers le site médiéval. Histoire de marquer une pause – et d’en apprendre un peu plus sur le site avant d’en franchir les portes – arrêtez-vous à la maison d’accueil, tout près de l’ampithéâtre qui accueille le festival de Crussol l’été. On y bénéficie d’une vue aux premières loges sur ce castrum dont l’empreinte continue d’imprégner l’ensemble du territoire aujourd’hui. Perché sur son éperon, Crussol est un symbôle et une identité. Réputé imprenable jusqu’à l’apparition des canons, le site du château déploie encore la mémoire de ses trois hectares et de ses 140 maisons dégringolant en terrasses et en fortifications autour de son piton. La silhouette n’a rien à envier à ses homologues cathares. Le GR® 42 le traverse de part en part, s’échappant par un petit passage voûté et permettant au randonneur de s’autoriser une errance parmi les ruines de ce monument historique qui ne le laissera pas, à coup sûr, insensible.

A la sortie du château, c’est une très belle section de sentier qui vous attend, d’abord sur le fil des falaises, avec vue sur le château, ensuite à l’ombre de chênes verts délicatement ondulés, pour se protéger du soleil qui inonde maintenant l’agglomération de Valence éparpillée, plus de 200m en-dessous, autour des courbes du Rhône. Au débouché des derniers arbres, la ligne du sentier s’engage sur une petite vire accueillante, entre deux grosses barres rocheuses. L’intimité avec la montagne de Crussol se fait ici plus étroite tandis que la vue, côté nord, se remplit maintenant de larges vallons au vert délicat. Une alternance de petites routes de campagnes encadrées de prairies fleuries et de petits chemins secrets m’amène au pied du village de Toulaud où les maisons en pierre s’enroulent autour de la colline sur laquelle s’appuie le bourg ardéchois.

Toulaud marque la fin d’une des plus denses journées de marche sur le GR® 42. Dans un vaste espace de champs fleuris et de sommets boisés, le petit village ardéchois annonce aussi la proximité de la Montagne Ardéchoise. La pause y est nécessaire.

Le GR® 42 s’en échappe par des ruelles étroites et de petits escaliers pour prendre la clé des champs à travers un beau paysage constellé de pois granitiques. Le col des Ayes est rejoint, annonçant la proximité de la Montagne Ardéchoise et sauvage. La châtaigneraie finit par m’envelopper, protectrice et toujours immensément lumineuse, jusqu’au col de Rotisson. Le tracé y quitte la route pour plonger dans un dense vallon boisé, franchir le Turzon puis se hisser sèchement en direction du col de Méran. Au sortir de la forêt, on retrouve l’Ardèche du haut, ses couleurs contrastées se cherchant entre le vert et le jaune des genêts, ses parfums entêtants, son silence apaisant, sa nature à peine troublée par quelques fermes isolées. Pour ma part j’y retrouve également le mur sombre et menaçant d’un orage répandant sa colère quelque part vers l’ouest. A pas loin de 600 mètres d’altitude – le Serre de Meran, en-dessous duquel passe le GR® 42, culmine à 611 mètres – les crêtes arrondies et ornées de bois de résineux ramenant vers le Rhône sont le dernier endroit où j’ai envie de croiser un orage. Depuis quelques minutes, le souffle frais d’une perturbation en puissance a remplacé la chaleur étouffante qui me collait les pieds au sentier il y a quelques heures. Le soleil, quant à lui, s’est évanoui derrière une armada opaque de cumulus menaçants. Je presse le pas jusqu’à Beauchastel.

Beauchastel, un village étape remarquable sur le parcours du GR® 42. On y croise l’Eyrieux avant le Rhône. Le fleuve star, celui qui côtoie le chemin, on le retrouve au niveau de La Voulte, franchi par une remarquable passerelle suspendue. La Voulte, son passé industriel, son bourg castral et son massif château, modelé sur près de cinq siècles, le randonneur peut prendre le temps de les découvrir avant de prendre à nouveau de la hauteur sur la grosse croupe qui jouxte le village. Depuis le départ, l’itinéraire joue aux montagnes russes. Jamais de gros dénivelé mais plutôt une succession de montées modérées qui, mises bout à bout, pourraient bien faire dire au marcheur que ce GR® 42 cache bien son jeu.

Ce GR® 42 est un GR® de flâneur. On y retient son pas pour se laisser distraire par le rythme de l’Ardèche. Sur ces petits chemins peu fréquentés, la lenteur n’est pas une nécessité mais peut bien devenir une richesse. Rien ne sert de courir, il faut marcher à point.

Pour ma part me voici bientôt à Rompon, petit hameau discret, fief de grimpeurs et d’ardéchois pur jus. Un lieu un peu en retrait, propice probablement à l’introspection, derrière lequel se glissent les balises pour s’en aller rejoindre le Pouzin. Au passage, hors GR®, après avoir laissé à main gauche la carrière à ciel ouvert, échappez-vous vers le Couvent des Chèvres, un site hors du temps, antique lieu d’estive de troupeaux menés par des bergers et des pâtres aujourd’hui disparus. Au-delà des ruines de l’édifice, la vue s’échappe dans toutes les directions, magnifiée au nord par l’union de la Drôme et du Rhône. Un mariage aquatique qui poursuit son histoire ensuite vers le sud, tout comme notre GR® 42 qui s’en va rejoindre tranquillement le Vivarais et l’Ardèche Méridionale d’ici quelques étapes.

– INFOS PRATIQUES –

Distances à couvrir : depuis Saint-Etienne, le GR® 42 a déjà parcouru une centaine de kilomètres lorsqu’il rejoint Saint-Romain-de-Lerps. La section de randonnée présentée dans ce reportage représente quant à elle une soixantaine de kilomètres. Elle peut se parcourir en 3 jours selon le découpage indicatif suivant :

  • 1er jour : Saint-Romain-de-Lerps – Toulaud (20,5km, 600m D+, 5h)
  • 2ème jour : Toulaud – Beauchastel (18 km, 750m D+, 4h50
  • 3ème jour : Beauchastel – Le Pouzin (19,5 km, 715m D+, 5h25)

Carte : IGN TOP25 1/25000è 3036OT Valence, Corniche de l’Eyrieux & IGN TOP25 1/25000è 3037OT La Voulte-sur-Rhône
Topo-guide à emporter : GR® 42 – Du Pilat à la Méditerranée par les Balcons du Rhône, 1ère édition, format : 20 x 13,5 cm, 144 pages, édité par la Fédération Française de la Randonnée Pédestre (15,90 euros) à découvrir et à commander sur l‘Espace Topo de la FFRandonnée
A consulter sur le web : pour une découverte globale, des chiffres et l’accès au tracé complet de l’itinéraire, rendez-vous sur la page dédiée au GR42 sur le site officiel MonGR.fr. Pour un récit d’expérience plus détaillé sur l’intégralité du parcours, rendez-vous sur le journal de voyage de Robert et Gisèle qui ont été parmi les premiers à le parcourir.
Meilleure saison : Mon reportage a été réalisé au mois de mai. Le GR® 42 peut être pratiqué toute l’année, ainsi que l’explique Claudette Baumes dans l’épisode. Mais la meilleure période reste le printemps, entre les mois de mai et de juin, avant l’arrivée des grosses chaleurs sur l’Ardèche, quand la végétation est encore jeune et les champs fleuris. L’automne reste une solide option sur le plan des températures. Les couleurs n’y sont pas aussi exaltantes sur le parcours qu’elles pourraient l’être en montagne ardéchoise, mais elles restent agréables, tout spécialement dans les forêts de chataigniers.
A qui s’adresse le GR® 42? : La partie ardéchoise du GR® 42 est la plus longue et aussi la plus sportive. L’effort reste toutefois contenu et à la portée d’un marcheur moyen. On vient d’abord sur le GR® 42 pour le contact avec la nature et la découverte d’un territoire. Les amateurs de petits villages ruraux, de bourgades au cachet authentique et ancien et/ou de patrimoine bâti devraient apprécier. Les amateurs de paysages y trouveront, pour leur part, le charme de sous-bois, la beauté reposante des premiers contreforts très collinéens du socle de la Montagne Ardéchoise et, quand l’horizon le permet, des vues étendues à travers la vallée du Rhône jusqu’aux pieds des Alpes. Le Rhône, aperçu dès qu’on prend un peu de hauteur, offre ses courbes gracieuses au marcheur sur la plupart des belvédères ardéchois du GR® 42. Un minimum sportif, mais surtout très contemplatif, le randonneur du GR® 42 apprécie également le confort de petites adresses coquettes, sans être luxueuses, pour son hébergement.

– MES PETITS CONSEILS –

  • Le passage à Saint-Romain-de-Lerps se fait dans le cadre d’une étape plus longue. Le randonneur arrive en général de Plats, où il a passé la nuit. Pour arriver à Toulaud, il faut compter 24km, 900m de dénivelé et près de 6h30 de marche. C’est une des étapes parmi les plus sportives du GR® 42. Qu’on se le dise !
  • A Saint-Romain-de-Lerps, on monte, même si c’est hors GR®, à la chapelle et à la table d’orientation du Roc. On y bénéficie d’une vue plein cadre sur la vallée du Rhône et celle de l’Isère. On y admire la ligne du Vercors et de la Chartreuse, plus loin. On y jette aussi un oeil sur l’Ardèche Verte, derrière soi. Un belvédère immanquable.
  • Le GR® 42, sur sa partie ardéchoise, totalise un certain nombre de kilomètres de goudron et de routes. La plupart du temps, il s’agit de petites routes de campagne ou forestières très agréables, sur lesquelles il fait bon se promener. Cela n’en demeure pas moins du bitume : évitez les chaussures trop rigides sur cet itinéraire. Préférez la légèreté et l’aération du pied, ainsi qu’une semelle ni trop tendre, ni trop dure, qui se courbe assez facilement, avec un bon maintien latéral.
  • Pour des raisons de conventions de passage, le tracé du GR® 42 n’arrive pas directement à Beauchastel mais au niveau du temple, sur la très passante route départementale 86. Il serait dommage de se priver de la visite de ce très joli village ardéchois en s’astreignant à ne pas quitter le balisage. Lors de sa descente vers Beauchastel, quitter le GR® au niveau du lieud-dit le Serre (point coté 268 sur l’IGN) via un balisage jaune PR permet non seulement de gagner du temps mais aussi d’arriver directement par le village. Une option à retenir.
  • Pour atteindre le Couvent des Chèvres : après avoir dépassé la carrière à ciel ouvert, en contrebas à gauche, le GR® 42 remonte en légère ascendance et atteint un large col peu marqué. Les balises poursuivent en descente de l’autre côté. A cet endroit, quitter le GR® et se diriger à gauche, vers l’est, en suivant une sente approximative. Elle finit par atteindre un large rebord sommital qui s’incline vers la vallée du Rhône. Vous y êtes. Le panorama est exceptionnel sur le fleuve et la Drôme. Les ruines de l’abbaye sont délimitées par un grillage. Attention : propriété privée.
  • La gestion du ravitaillement : on traverse pas mal de villages sur ce GR® 42. Il n’y a pas de difficulté particulière pour se ravitailler en eau ou en nourriture en cours d’étape. La section entre Toulaud et Beauchastel est la plus isolée. Il faudra peut-être, sur celle-ci, prévoir un peu plus. D’autant qu’il peut faire très chaud dans le secteur.

EN BREF

Ma cartographie de l’Ardèche s’étoffe avec ce GR® 42. J’en retiens quelques spots remarquables : le château de Crussol puis la liaison vers Toulaud, le débouché sur les plus hauts sommets du parcours avec la Montagne Ardéchoise en toile de fond, l’intéressant petit village de Beauchastel, le vallon retiré et secret de Vieux Rompon, le belvédère du Couvent des Chèvres et la très jolie descente vers Le Pouzin. Beaucoup de positif et une randonnée qui s’apprécie.

 

by-nc-ndCe reportage Carnets de Rando, sous licence Creative Commons, est la propriété exclusive de Carnets de Rando. Son usage à des fins non commerciales est autorisé à condition de mentionner son appartenance au site www.carnetsderando.net. Pour toute autre utilisation, merci de me contacter.

 

 

 

 

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