Le Tour du Pays de Saint-Félicien (2ème partie)

L’aventure continue sur les chemins du Tour du Pays de Saint-Félicien. On y quitte les forêts d’altitude pour perdre quelques centaines de mètres et pénétrer un univers plus champêtre où les hommes, leurs villages et leurs activités sont davantage présents. On y retrouve évidemment la Daronne qui, pour l’occasion, a façonné l’une de ses pépites dont le territoire gratifie le randonneur depuis le départ : belles et inattendues, farouchement nature, les Gorges de la Daronne se révèlent à qui a la curiosité de s’y aventurer. Un morceau de choix sur un itinéraire qui n’en manque pas. Carnets de Rando y a plongé dans cette seconde partie.

Difficulté : difficile | Longueur : 17,1 km | Durée : 5h30 | Dénivelé : 520m

C’est presque une nouvelle Ardèche Verte qui se découvre. Après les hauts versants colonisés par la forêt des abords du col du Marchand, je fais mon entrée dans un nouvel univers, plus ouvert, plus peuplé et plus cultivé. Les sillons creusés par les rivières dans le paysage se devinent, vastes échancrures séparant entre eux des plateaux sommitaux où se sont développées les activités humaines. On y entend résonner les sonnailles et le moteur des tracteurs. Malgré tout, des sentiers discrets y sont tracés, échappant au regard des hommes. Je surgis ainsi dans une prairie recouverte de hautes herbes agitées par la caresse du vent. L’expression prendre la clé des champs prend véritablement tout son sens ici ! Deyras, silencieux et désert, est rejoint avec une expression de satisfaction un peu béate. Le balisage conduit à sa sortie, en direction de Méjon, par une petite route toute aussi solitaire. Le bitume, omniprésent, en début d’étape, s’efface là où  la terre s’effondre, rongée par la Daronne qui y a créé des gorges pudiques.

Frontière entre la nature intacte et le monde des hommes, lisse et cultivé, les Gorges de la Daronne distillent un univers confidentiel que la proximité de celles du Doux et de son vélorail ont presque relégué à l’anonymat. Regrettable erreur ! Surgies subitement dans le paysage comme le lapin du chapeau du magicien, elles sont semblables à une parenthèse enchantée sur un itinéraire déjà riche en surprises

Ce petit joyau de l’Ardèche Verte s’y tortille en contorsions extravagantes, poussée à l’excès par sa furieuse envie d’éroder les obstacles qui se dressent sur la route de son mariage avec le Doux, quelques centaines de mètres seulement plus bas. Une parenthèse enchantée en forme de havre pour de nombreuses espèces animales : Circaète Jean-le-Blanc, couleuvre d’Esculape, castor, loutre… Les représentants de la faune locale ont assurément ici des noms prestigieux. Le sentier descend en lacets forestiers jusque sur ses berges tranquilles, offrant ici et là quelques belvédères prometteurs et utiles pour se figurer l’allure générale du lieu. Une étroiture, sous la cime dite du Reposoir, permet de poser le regard sur l’une des sections les plus encaissées et accidentées des gorges. Le franchissement de la petite passerelle suspendue au-dessus de la Daronne intègre, plus loin, le rang de ces moments fabuleux où l’imagination transforme l’action la plus simple en incroyable aventure, renvoyant à ces fugaces plaisirs de l’enfance où le moindre pont exerçait sur soi une pointe amusée d’adrénaline !

A la suite d’une courte pente, la lumière inonde à nouveau l’espace. Une belle et riante prairie, verte évidemment, invite à la flânerie. Au bout, l’architecture agréable de la bâtisse de Saint-Sorny, qui jouxte la chapelle du même nom, achève de conférer au lieu une douce aura d’éternité. Saint-Sorny, outre d’être un petit havre de paix au coeur des gorges, est l’expression même des multiples trésors que le site a à offrir au visiteur. Le lieu n’est pas qu’une énième démonstration de ce que la nature a de plus beau à nous offrir, c’est aussi un livre ouvert sur l’histoire de ce territoire. Un agréable sentier d’interprétation, conçu sous forme de jeu de piste, permet de mettre peu à peu bout à bout les différents éléments qui façonnent l’identité de l’endroit. Je me hisse sur la colline qui domine Saint-Sorny. On y bénéficie d’un point de vue intéressant sur les Gorges de la Jointine, descendues du nord pour rallier la Daronne. On y apprend aussi l’importance des Gorges dans l’histoire de la Résistance.

Je savoure le charme de ces dernières foulées, émerveillé par ces petits sentiers qui parviennent à éviter l’habitat humain, à se dissimuler et à disparaître clandestinement dans la nature

En quittant les gorges, c’est le plateau de Colombier-le-Vieux qu’on rejoint ensuite. Ses fermes, ses champs et ses routes départementales. Un charme se rompt, démarré quelques heures plus tôt après avoir quitté Deyras le matin. Les Gorges de la Daronne sont incontestablement le point d’orgue de cette étape et peut-être même du Tour du Pays de Saint-Félicien tout entier. Saint-Félicien, qui apparaît dans le lointain. Même si la Daronne et ses gorges sont derrière, la journée n’en est pas finie pour autant. L’essentiel du kilométrage reste encore à faire. Loin de favoriser la facilité du bitume, l’itinéraire parvient jusque dans les derniers mètres à imaginer sa trace à travers des paysages de campagne bosselée. C’est dans le creux des collines, au fil d’immenses champs fleuris ou sous les frondaisons de petits bois ombragés, accompagné par le murmure de sources discrètes et le bruit de quelques troupeaux, que se termine la marche. La longueur de l’itinéraire s’évanouit aussitôt, remplacée par le plaisir primaire d’être simplement là. Quand Bozas est finalement rejoint, une expression satisfaite et béate pourrait bien toujours être là, sur le visage du randonneur.

Derniers mètres sur le tour du Pays de Saint-Félicien, à travers les chemins secrets de la campagne rejoignant Bozas

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– INFOS PRATIQUES –

Carte : IGN 1/25000 2935E Satilieu & 3035O Tournon-Sur-Rhône
Accès : en voiture, en venant du nord rejoindre l’A7 via Lyon ou, en venant du sud (Marseille ou Toulouse), via Orange et prendre la sortie 13 – Tain l’Hermitage. Après le péage, au rond-point, prendre tout à gauche et suivre la direction Tournon, Le Puy : après avoir contourné Tain par le sud, la route repart au nord en longeant le Rhône et rentre dans Tain. Bien suivre Tournon en serrant à gauche et emprunter le pont sur le Rhône. A sa sortie, tourner à droite et traverser Tournon. Au rond-point proche de la sortie nord de la ville, tourner à gauche, direction Saint-Félicien. S’engager sur la route des Gorges du Doux et la quitter assez rapidement à droite par la D532, après la sortie de Tournon, via un petit pont. La route s’élève en direction de Saint-Félicien via Crémolière et enfin Saint-Victor.
Topo : le topo de cet itinéraire fait l’objet de la Fiche-Rando n°21 « Tour du Pays de Saint-Félicien – Jour 3 : Saint-Victor – Bozas » disponible à l’Office de Tourisme du Pays de Saint-Félicien (voir plus bas)
Notes : les Gorges de la Daronne sont classées comme ENS – Espace Naturel Sensible – au même titre que celles du Doux et du Duzon. Une attitude respectueuse est donc demandée en les traversant. Elles abritent également un sentier d’interprétation qui nécessite, pour être utilisé au mieux, d’être équipé d’une besace contenant tout le matériel de jeu et les recommandations nécessaires pour en profiter et s’amuser. Ces documents sont disponibles auprès de l’Office de Tourisme de Saint-Félicien.
Les hébergements : je ne saurais vous recommander, pour votre hébergement, de faire halte chez Julie et Sébastien Rosset, à la ferme-auberge de Corsas. Ce jeune couple de restaurateurs et agriculteurs a fait davantage qu’amener une passion pour les produits faits maison et un talent pour une cuisine fine et savoureuse. Ils sont également à l’origine d’une dynamique locale qui permet aux territoires ruraux de demeurer vivants à l’année. Sans compter un site qui vaut le détour. J’ai vraiment passé un excellent moment avec eux.
Liens utiles : pour mieux connaître le territoire, ses activités, son calendrier mais aussi ses autres possibilités d’hébergement, ou encore pour vous procurer le topo-guide des promenades et randonnées, une visite sur le site de l’Office de Tourisme du Pays de Saint-Félicien s’impose.
Bibliographie : L’Ardèche… à pied | C’est la 5ème édition du topo-guide officiel édité par la Fédération Française de Randonnée Pédestre. 46 itinéraires de Promenade & Randonnée y sont recensés pour approfondir votre découverte de l’Ardèche, accompagnés de leurs cartes et de leurs explications. 7 itinéraires sont notamment consacrés à l’Ardèche Verte. Prix indicatif : 15,20 € | Ref.D007

EN BREF

Loin de se contenter d’une enthousiasmante première étape, le Tour du Pays de Saint-Félicien s’offre l’ambition de surprendre encore le marcheur dans une nouvelle journée où le paysage se renouvelle entièrement. Au milieu de ce tour de force, les Gorges de la Daronne enfoncent le clou pour élever la randonnée au rang des itinéraires remarquables de l’Ardèche.

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