A la découverte de la Buèges

A l’écart des standards du tourisme dans l’Hérault, la discrète vallée de la Buèges protège ses trésors avec sagesse, à l’image d’un Graal tenu secret et à l’abri de la déferlante touristique qui s’abat quelques kilomètres plus au sud, à Saint-Guilhem-le-Désert. Il faut être un peu du coin, ou connaisseur ou encore curieux, pour avoir vent de l’existence de ce petit coin de paradis pris en tenaille entre les Gorges de la Vis et de l’Hérault, à l’ombre des belles falaises de la Séranne. C’est cet Hérault plus confidentiel que je souhaitais vous faire découvrir.

Difficulté : moyen+facile | Longueur : 16 km+8km | Durée : 5h30+2h30 | Dénivelé : 680m+85m


Non, l’Hérault ne s’arrête pas à Saint-Guilhem-le-Désert ! Au-delà existe même l’une des vallées les plus secrètes du département. Pour l’atteindre, il faudra d’abord continuer par la petite route départementale qui rejoint Causse-de-la-Selle. Puis, ensuite, suivre la direction de Saint-Jean-de-Buèges pour commencer, quelques kilomètres plus loin, à distinguer les hautes crêtes du massif de la Séranne. Qui aurait cru débusquer ici ce qui a tout l’air de montagnes à prendre au sérieux ? Qui plus est lorsque ces sommets dominent une douce et agréable vallée dont l’existence était à peine soupçonnable ? L’endroit semble coupé du reste du monde, à l’écart de l’effervescence fiévreuse des grands sites héraultais. Je me sens soudain dans la peau d’un chasseur de trésor sur le point de toucher le pactole. Enserrée entre Navacelles, Saint-Guilhem et les Gorges de l’Hérault, la vallée de la Buèges joue les discrètes et protège jalousement ses valeurs : le calme de sa nature et une rivière étonnante qui lui a donné son nom. Un petit paradis, barricadé par les falaises de la Séranne et de son cirque qui accrocheront inévitablement le regard de ceux que les horizons verticaux subjuguent habituellement.

Née au pied de la montagne de la Séranne, la Buèges offre, à ses sources, le spectacle d’une oasis de nature et de paix aux eaux translucides. Dépourvue de toute indication sérieuse, cette vallée si confidentielle pourrait-elle être le secret le mieux gardé de l’Hérault ?

L’isolement des villages de la vallée de la Buèges n’a d’égal que l’authenticité qui s’en dégage. Ici, pas d’artifice touristique : tout n’est que passion pour cette vallée chargée d’histoire. Desservies par des sections de sentiers superbes, les hauteurs de la Séranne, et plus particulièrement le sommet de Peyre Martine, réservent plus tard au marcheur des visions épiques. Ici, le buis et le calcaire sont unis pour le meilleur et pour le pire. A 782 mètres d’altitude, la vision se libère soudain dans toutes les directions tandis qu’on vient effleurer les versants abrupts du cirque qui dégringolent sous nos pieds. Quelques minutes plus tard, le pilier massif des falaises du Caylaret surgit en contrebas. Elles pourraient ne demeurer qu’un élément spectaculaire du paysage s’il n’y avait cette vire discrète qui s’y apercevait. Le randonneur dévoré de curiosité et familier de ce genre de terrain étroit et quelque peu aérien s’y engagera de lui-même pour un point de vue inédit sur Saint-Jean-de-Buèges, la modeste capitale locale, déployée autour de son château, au pied du très esthétique Roc de Trascastel.

carré buèges

La Buèges y disparaît à l’est, dans un vallon boisé empli de mystères à percer. Quitter le sentier n’y est pas seulement une option, mais une nécessité pour ne passer à côté d’un décor surnaturel, encadré de part et d’autre d’un tunnel végétal aux formes fantasques, où la rivière se faufile tantôt lentement, masse opaque et muette, tantôt vigoureusement, en se rompant en facétieuses et esthétiques petites chutes. A l’image du reste de la vallée, c’est la curiosité et le désir d’exploration qui vous mèneront aux plus belles découvertes. La Buèges se fait ici plus exotique et laisse le visiteur s’égarer dans un décor surnaturel, encadré de part et d’autre d’un tunnel végétal aux formes fantasques. La rivière s’y faufile tantôt lentement, masse opaque muette qu’on jurerait immobile, tantôt vigoureusement, en se rompant en de multiples petites chutes très esthétiques, qui jouent avec les rochers et les racines. L’eau est ici incroyablement claire et fraîche. Des vasques naturelles et limpides auraient invité à la baignade en une autre saison. Une authentique aura de féerie plane en ces lieux secrets qu’on a la sensation d’avoir le privilège de découvrir pour la première fois.

Beaucoup plus atmosphérique que la partie montagneuse, la randonnée au fil de la Buèges réserve elle aussi son lot de surprises à qui aura la volonté et la curiosité de les débusquer. On y savoure avec délectation la sensation de jouer les explorateurs dont le rêve insatiable de pépites se trouve finalement récompensé au détour d’un passage secret

Et puis soudain, plus loin, tout s’arrête. La Buèges ralentit son cours et se transforme en un cours bourbeux et noirâtre. L’eau croupie vient lécher les berges boueuses et humides avant de tout bonnement s’évanouir. Résurgence souterraine à sa source, la rivière replonge sous terre subitement, laissant le marcheur sidéré dans un lit de tuf et de calcaire mousseux soudainement asséché. Hors période de crue, le marcheur peut donc évoluer à sa guise dans cet environnement insolite et brouillon, constitué de gros blocs arrondis et de cuves peu profondes. Un univers recouvert d’une épaisse couverture mousseuse défraichie et ponctué ici et là d’étranges et éphémères petites formations crayeuses. A partir de ce point, qu’on soit en rive droite ou gauche, le chemin vient s’arrondir à l’aplomb du pied du Grand Guilhem, un sommet boisé peu remarquable, avant de rejoindre la route venant de Saint-André-de-Buèges au niveau du joli pont de Vareilles. C’est là que se termine cette aventure au fil de la Buèges et de sa vallée, auxquelles on ne pourra pas enlever, depuis le départ, d’avoir su réserver au visiteur de bien belles surprises.

carré buèges 2

– INFOS PRATIQUES –

Carte : IGN TOP25 1/25000è 2642ET Saint-Guilhem-le-Désert
Accès : en voiture, Montpellier, par A9, sortie 31 « Montpellier-ouest ». Au rond-point, après le péage, suivre « Croix d’Argent, Hopitaux-Facultés ». Au suivant, prendre à gauche « Béziers, Sète, Millau ». Plus loin, tenir la droite, direction Millau. Au rond-point suivant, continuer tout droit. Plus loin, tenir la gauche, direction Millau. Rejoindre ainsi l’A750 et prendre la sortie 58 « Saint-Guilhem-le-Désert ». Suivre la D4, rejoindre et traverser Saint-Guilhem. Continuer sur la D4 jusqu’à Causse-de-la-Selle. Tourner à gauche par D122, direction Saint-Jean-de-Buèges. Descendre dans la vallée de la Buèges. Pour la randonnée du Cirque de la Séranne : au cédez-le-passage, au bas de la descente, prendre à gauche direction Pégairolles. Environ 4 km plus loin, tourner à droite, direction le Méjanel et « Sources de la Buèges ». Stationnement sur le parking prévu, plus loin, à droite. Pour la randonnée au fil de la Buèges : tourner à droite et se stationner à l’entrée de Saint-Jean, juste après le pont sur la Buèges, à gauche.
Topo Cirque de la Séranne : après avoir visité le site des sources, revenir au parking puis à la route jusqu’au croisement. Franchir le petit pont à gauche et tourner de suite à droite par une petite route. Un peu plus loin, le sentier quitte la route à gauche et s’arrondit pour rejoindre Pégairolles-de-Buèges. Traverser le village et le quitter après un bel escalier. Repérer le balisage qui descend à gauche juste après et rejoint une intersection. Prendre à droite (1), par un beau sentier à flanc et rejoindre une route. La suivre d’abord à gauche et la quitter plus loin, à droite, par un chemin qui s’enfonce dans la forêt (2). On atteint rapidement les falaises et on chemine sur un beau sentier bordé de murets de pierres qui escalade la montagne. Rejoindre la partie sommitale, marcher à travers les buis et atteindre une intersection marquée (3). Suivre à droite les balises du GR et longer le bord de la vallée, puis celui du cirque de la Séranne. On rejoint finalement un poteau indicateur qui marque l’intersection avec le chemin montant par le cirque (4). Suivre en face le balisage jaune qui monte vers le sommet de Peyre Martine. A l’approche de celui-ci, faire un aller-retour jusqu’au sommet pour le point de vue (5). C’est de là qu’on peut aussi rejoindre le bel éperon qu’on voit sur la vidéo. Revenir au sentier principal et continuer de le suivre en descente légère. Il passe sous une ligne haute tension et rejoint une sorte de large piste (6). La suivre à droite et la quitter un peu plus loin à gauche – balisage jaune. Après une section plate et plus clairsemée, le chemin se met à descendre plus abruptement pour rejoindre le pied de la falaise du Caylaret. Repérer la vire qui s’arrondit et disparaît derrière et la parcourir en aller-retour (7). Puis reprendre le cours de la descente jusqu’à Saint-Jean-de-Buèges. Quitter le village par le sud et par la route. Ne pas traverser le pont à la sortie et continuer en rive gauche, par une petite route communale (8). Une centaine de mètres après un calvaire, à gauche, prendre un sentier à gauche qui rejoint un gué sur la Buèges. Ne pas le prendre mais prendre à droite et rejoindre la route, qu’on suit à nouveau à gauche. La suivre toujours tout droit. Elle finit par se transformer en sentier et rejoint les sources de la Buèges.

topo_seranne

Topo Vallée de la Buèges : Traverser Saint-Jean vers l’est, en direction de la vallée de la Buèges qui s’ouvre à l’est, derrière le village. Suivre d’abord une route, puis un chemin carrossable, au pied du Roc de Tras Castel. L’itinéraire se scinde plus loin au niveau de la Buèges et d’un gué, avec des plots (1). Ne pas franchir le gué. Préférer continuer par le petit sentier qui s’éclipse en rive gauche. Il suit le cours de la Buèges, de plus ou moins près, avant de remonter plus franchement en forêt et à croiser une large piste (2). Suivre celle-ci à droite et redescendre progressivement jusqu’au Pont de Vareilles (3) qu’on traverse, à droite. Après le pont, repérer le sentier qui repart en rive droite. Ce sera, la plupart du temps, un chemin assez large qui longe la rivière en s’en approchant parfois assez près. Il rejoint le gué qu’on franchit pour revenir à Saint-Jean-de-Buèges.

topo_bueges

Notes : la variante de la vire, dans l’itinéraire du Cirque de la Séranne, n’est à entreprendre que si vous êtes familier de ce style de terrain : plus ou moins étroit, nécessitant de la vigilance et un pied sûr, toujours proche du vide. Il n’y aucune protection. Donc pas d’héroïsme ! Sur l’itinéraire au fil de la Buèges, je vous invite à la curiosité pour dénicher tous ces beaus spots qu’on aperçoit dans la vidéo. Ils ne sont pas difficiles d’accès. Certains plus faciles que d’autres à atteindre. Profitez d’une trouée à l’écart du chemin pour descendre vers la rivière et profiter du spectacle. Il y en a plusieurs sur le parcours, certaines plus dignes d’intérêt que d’autres.
Les hébergements : venu hors saison, c’est Eric qui m’a accueilli à sa charmante Auberge de la Vallée. Une belle adresse, à la fois familiale et gourmande, à l’aplomb de la face ouest du Roc de Tras Castel et face à la montagne de la Séranne. Chambres agréables et fonctionnelles mais, surtout, une excellente adresse pour savourer des produits locaux, tant à boire qu’à manger. Chambre pour 2 personnes, à partir de 58 euros. Restaurant à la carte et formules à 19,50 et 24 euros.
Liens utiles : une visite sur le site internet de Hérault Tourisme apparaît comme une introduction utile et recommandable à tout périple dans l’Hérault.
Bibliographie : L’Hérault… à pied | C’est la 6ème édition du topo-guide officiel édité par la Fédération Française de Randonnée Pédestre. 69 itinéraires de Promenade & Randonnée y sont recensés pour approfondir votre découverte de l’Hérault, accompagnés de leurs cartes et de leurs explications.Prix indicatif : 15,20 € | Ref.D034

EN BREF

Qu’on la contemple les yeux dans les yeux ou des hauteurs des falaises de la Séranne, la Buèges est définitivement la petite pépite méconnue du département de l’Hérault. Une vallée riche et accueillante, des reliefs verticaux aux allures de montagne, un cours d’eau plein de surprises baignant dans une ambiance féerique et, enfin, des villages de caractère attachants. Tous les éléments pour des randonnées grand public ou sportives sont au rendez-vous. Un lieu à découvrir assurément lors d’un séjour dans l’Hérault pour les marcheurs désireux de ne pas suivre les foules.

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6 Comments

    1. carnetsderando Auteur de l'article Répondre

      Super ! Franchement c’est le contraste assuré entre le côté incontournable et touristique du secteur Saint-Guilhem et là, juste quelques kilomètres au-dessus, ce côté confidentiel et charmeur de la Buèges et des montagnes alentours. Une bonne destination pour ton blog assurément !

  1. le marcheur masqué Répondre

    Très belle vallée que celle de la Buèges , qui jusque là semble préservée de trop de tourisme , comme vous le faites remarquer. Il me semble évident que vous appréciez cet « isolement », c’est pourquoi – je me place là en tant que »grand marcheur »,amoureux de nature et de randonnée depuis toujours – je ne comprends pas que vous ne résistez pas à l’envie d’en faire la promotion sur internet , ce qui ne manquera pas d’attirer du monde?!?! Je ne veux pas être moralisateur mais comme je le disais plus haut , j’ai toujours marcher , notamment dans l’Hérault et dans les PO d’ou je suis originaire et je déplore une prolifération de personnes , depuis quelques années , dans des lieux jusque là épargnés par le tourisme. Il est évident qu’ internet n’est pas étranger à ce phénomène . Quel paradoxe !!! Apprécier l’isolement d’un lieu et vouloir le faire connaitre à la terre entière . Vous aimez la nature, j’en suis convaincu. Ne pourriez vous pas laissez aux autres le soin de découvrir par eux même ce dont ils ont besoin? Salutations… distinguées .

    1. carnetsderando Auteur de l'article Répondre

      Paradoxe complexe en effet je vous l’accorde. Vu dans l’autre sens, c’est presque égoïste de garder certains endroits pour soi. Le boulot d’un média c’est d’être un auxiliaire à la découverte pour les gens qui n’ont pas le sens de la recherche. Dans le cas de l’Hérault – ou d’ailleurs – c’est aussi une envie de valoriser des bouts de territoire qui ne sont jamais montrés. Dans un département, quel qu’il soit, on parle très souvent des mêmes lieux. C’est la vitrine, là où tout le monde va et ça crée des déséquilibres. Rappelons qu’il y a des gens qui vivent du tourisme dans un territoire (hébergements, restaurants, prestataires d’activités…) et qui ont besoin qu’on allume des petits projecteurs sur eux parce qu’ils n’ont pas assez de visibilité pour le faire par eux-mêmes. Eux ont envie que le tourisme arrive chez eux. C’est de la survie économique. C’est donc aussi un rôle que j’endosse avec le blog. Mais ce rôle est aussi de rappeler que visiter un lieu se fait avec le respect de ce lieu et l’adoption de comportements adaptés. Dans tous les cas, soyez rassuré : même si on constate une « légère » augmentation de tourisme dans ces lieux, la vallée de la Buèges ne sera jamais Saint-Guilhem-le-Désert et les amoureux de calme et d’isolement y trouveront toujours ce qu’ils sont venus à y chercher. Et, bonne nouvelle : ce style de public est, en général, un public respectueux et agréable.

  2. Audrey Répondre

    Il faut être aussi du coin pour savoir que la station d’épuration est défectueuse est se déverse dans la rivière. Puis la pisciculture aussi déverse de nombreux produit toxique… Alors un bon conseil, évitez de vous y baigner ou de boire l’eau du robinet…. les habitants ont été contaminés, mais ça c’est tabou !

    1. carnetsderando Auteur de l'article Répondre

      Forcément ce n’est pas les informations qu’on collecte quand on vient simplement s’y promener. On espère que la situation s’améliorera pour tous.

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