De villages en barrages : la haute vallée de la Dordogne, version trek

Un trek en Corrèze ? Tout jeune en plus ? Il n’en fallait pas plus pour titiller ma curiosité et me retrouver, un beau matin, au sommet du belvédère de Saint-Nazaire, face aux gorges de la Dordogne, resplendissante, paré à passer ma journée à découvrir ce fameux itinéraire de villages en barrages. En tout 16 étapes, 150 kilomètres et 6000 mètres de dénivelé dont je ne vais parcourir que la deuxième étape, jusqu’à Liginiac, en guise d’introduction. Mais quelle étape ! Ici la nature – un peu aidée par les hommes – a oeuvré pour donner au marcheur de quoi s’éblouir régulièrement. De panoramas d’envergure en sites spectaculaires, de villages en barrages, introduisez-vous à ce qui pourrait prochainement devenir une classique de la grande randonnée en France.

Difficulté : assez difficile | Longueur : 150 km | Durée : 16 jours | Dénivelé : 6400m

En choisissant la deuxième étape comme décor de ce nouvel épisode de Carnets de Rando, je m’assurais la garantie de bénéficier, d’entrée de jeu, de quelques-uns des meilleurs panoramas sur les gorges de la Dordogne. Le départ officiel de ce trek, c’est Bort-les-Orgues, posé au pied de ses fameux orgues basaltiques. La Dordogne a formé un vaste lac, au nord de l’agglomération, depuis la mise en eau du lieu et la création du barrage de Bort. C’est le premier barrage de l’itinéraire, d’ici à celui de Marèges, en-dessous de Liginiac. Il y en aura encore deux autres avant d’atteindre Argentat, terminus de cet itinéraire de 150 kilomètres donné en 16 jours de marche. Un tracé qui épouse plus ou moins le cours de la rivière, toujours prompt à offrir une vue sur les gorges dès que cela est rendu possible, mais qui s’aventure également dans les terres, à la découverte d’un territoire 17 communes dont le cœur bat au rythme de la Dordogne.

La grande vitesse, laissons-la au TGV ! La découverte de ce sentier impose de ralentir l’allure, de quitter les axes principaux et d’ouvrir grand les yeux. Comment mieux qu’à pied ou à vélo pouvons-nous entrer dans l’intimité des paysages, écouter la nature chanter, franchir un bras d’eau ? (Jean-Marc Chirier, président de l’association et créateur de l’itinéraire)

Un énième GR diront certains. Ce serait pourtant une regrettable erreur de résumer ce trek à cela. Déjà parce qu’il n’en est pas un : la Dordogne, de Villages en Barrages est porté par l’énergie d’une association éponyme et non par la Fédération Française de Randonnée. Ensuite parce que, derrière cette initiative, il y a une sincère et farouche volonté d’ouvrir les portes d’un territoire à ce public qui aime découvrir une région en marchant. Les Corréziens aiment leur pays. L’hospitalité des locaux et le plaisir à accueillir les randonneurs dans chacun des villages-étapes du parcours sont réels. Et des choses à découvrir en Dordogne, il y en a, n’en doutez pas !

La Dordogne, en tant que rivière, c’est une découverte intégrale pour moi. Jusqu’à maintenant, le nom m’évoquait le département, le Périgord et la grotte de Lascaux. A ces basiques s’ajoute aujourd’hui l’image d’une rivière domptée, entrelacée dans des gorges modestes mais qui méritent largement la visite. Les belvédères y abondent, certains étant formellement incontournables. C’est de l’un d’entre eux, celui de Saint-Nazaire, que je donne le coup d’envoi de mon reportage. Une avancée à découvert qui, s’échappant d’un bois accueillant, me révèle la rivière. Elle luit ici d’un éclat bleu nuit, légèrement platine, surmontée par les versants boisés des gorges. La Diège, l’un de ses affluents, l’y rejoint, ajoutant au côté superbe du paysage. A l’image de Roc Grand ou de Gratte-Bruyère un petit peu plus loin, le belvédère de Saint-Nazaire met tout le monde d’accord et ancre ce parcours de grande randonnée dans la course aux futurs classiques de l’itinérance pédestre.

La Dordogne, de Villages en Barrages est une invitation à l’évasion et au ressourcement. Un voyage au coeur d’une nature apaisée, loin de l’agitation du monde et à la rencontre d’un territoire qui souhaite raconter son histoire au marcheur. Ce n’est pas pour rien si le terme qui a été choisi par l’association pour le définir est l’itinérêve

Côté terre, on alterne passages agréables et ombragés dans de belles forêts riches en surprises – cascade, passerelles, escaliers – et traversées d’espaces ouverts et de vastes prairies de fauche fleuries. La marche sait s’y faire douce et mesurée mais n’oublions pas pour autant que la nature accidentée de cette partie de la Corrèze destine l’itinéraire à des marcheurs un tant soit peu sportifs : à votre arrivée à Argentat, vous aurez mine de rien accumulé dans les 6000 mètres de dénivelé positif ! Enfin, rappelons que la Dordogne, de Villages en Barrages, c’est aussi la découverte des communes qui constituent l’âme du territoire : Liginiac, Sérandon, Gros-Chastang, Saint-Martin-la-Méanne… Autant d’étapes agréables où le sourire des habitants vous fera rapidement oublier l’effort de votre journée de randonnée !

dordogne de villages en barrages

Le belvédère de Roc Grand, l’un des plus confidentiels que j’ai pu découvrir. C’était juste avant l’orage qui a suspendu le tournage !

Les immanquables du parcours

Les belvédères : vous l’aurez compris, l’une des grosses richesses visuelles de l’itinéraire, ce sont ses points de vue sur les Gorges de la Dordogne. Certains sont même devenus des éléments visuels clés de l’identité du parcours. J’ai eu la chance de pouvoir en découvrir trois sur ma route. Si l’ampleur de Saint-Nazaire stupéfait, j’ai également beaucoup apprécié le belvédère de Roc Grand, plus intimiste et sauvage. Au rang des incontournables, on citera également celui de Gratte-Bruyère, celui de Roc Blanc et aussi de Roc Castel.

Les barrages : comme indiqué dans le titre, on marche de villages en barrages. Il est donc normal que ces grands édifices soient à l’honneur au fil de la marche. Le visage de la Dordogne actuel est directement lié à leur construction. Tout comme l’histoire du pays et des hommes qui l’habitent. Le tracé passe donc par plusieurs sites où le randonneur bénéficiera d’une vue spectaculaire sur ces constructions. C’est le cas pour celui de Chastang, notamment, au niveau du Roc de Busatier, mais également à Gratte-Bruyère pour celui de l’Aigle.

Spontour : c’est le terminus de la 6ème étape, jadis port d’embarquement et chantier de construction des gabares, ces embarcations traditionnelles à fond plat. Considéré comme le dernier village authentique de la vallée de la Haute-Dordogne, Spontour est l’une des étapes incontournables de l’itinéraire.

La Vallée de la Luzège : tout comme la Diège précédemment et le Doustre plus tard, la Luzège est un affluent de la Dordogne qui a donné vie à une jolie vallée. Le tracé du trek permet de la découvrir et de la traverser. Il offre surtout l’opportunité d’un coup d’œil sur un monument spectaculaire : le Viaduc des Rochers Noirs, un ouvrage ferroviaire impressionnant qui enjambe la rivière à 92 mètres de haut et classé aujourd’hui à l’inventaire des Monuments Historiques.

Le Jardin de Bardot : rien à voir avec l’amie Brigitte ! Le Jardin de Bardot se dévoile à l’étape 9. Il s’agit de cultures en terrasses qui descendent jusqu’à la rivière et dont l’origine remonte à un siècle. Le Bardot en question était le nom de la maison des grands-parents de Joseph Mas, le co-créateur, avec sa femme Maria, de ces jardins extraordinaires et uniques. Ils y récoltèrent des fruits inconnus dans la région qu’ils vendaient aux habitants. Le site s’étend sur près de 1500m² de terrain.

Recommandations avant de partir

N’oubliez pas le topo : ce n’est pas parce que la Dordogne, de Villages en Barrages, n’est pas un itinéraire FFRandonnée qu’il n’a pas son propre topo ! Celui-ci existe et ce sont les gens de chez VTopo qui se sont attelés à sa réalisation. VTopo on les connaît bien pour leurs topos d’escalade et de VTT. Une boîte jeune et dynamique qui est sortie, pour l’occasion, un peu de ses thématiques habituelles pour nous offrir un joli petit livre détaillant les étapes une par une. Il est disponible au tarif de 15 euros (+ 5 euros de frais de port) en envoyant un chèque à l’ordre de l’association : La Dordogne de Villages en Barrages, mairie, La Bitarelle, 19320 Gros-Chastang. Ou bien sur le site de l’éditeur, à la source comme on dit : http://www.vtopo.fr/rando-pedestre-la-dordogne-de-villages-en-barrages.html

Voyagez light : vous le savez probablement, l’époque où on partait fièrement en itinérance avec sa tente, ses gamelles, son réchaud et ses 20 kilos sur le dos, c’est has been ! Le trekkeur moderne a suivi la même direction que les vêtements techniques : il s’est allégé ! Aujourd’hui, pour profiter d’un itinéraire, il est de plus en plus plébiscité de porter un sac léger. Pour ce faire, on fait appel à des services qui se chargent de nous transporter les affaires d’une étape à l’autre. La Dordogne, de Villages en Barrages, ne déroge pas à la règle. Une petite entreprise de transport locale, basée à Liginiac, se charge de cette mission pour 150 euros le trek intégral ou à la demande pour un itinéraire personnalisé. Demandez A.F. Transports au 06.40.05.59.58 ou par mail taxiangel@orange.fr

Personnalisez votre itinérance : l’un des gros avantages d’un itinéraire géré par une association, c’est qu’il y a toute une structure derrière pour vous renseigner et vous aider à construire votre projet de randonnée. Alors, évidemment, le conseil ne concernera pas les randonneurs 100% autonomes qui prennent le départ, font leur vie, qu’on n’entend jamais sur le parcours et qui rentrent ensuite chez eux dans la plus grande discrétion. Mais, après, il y a tous les autres, ceux qui ont des doutes, des interrogations, qui ont besoin d’infos, d’être rassurés ou guidés dans leurs préparatifs et leur organisation. Si vous vous reconnaissez, n’hésitez pas à solliciter l’aide de l’association. Ils connaissent parfaitement l’itinéraire ainsi que les hébergements. Ils pourront vous aider à préparer votre aventure au fil de la Dordogne. Pour cela, un numéro de téléphone, le 06.47.12.83.66 ou un mail : contactlddveb@gmail.com

Faites davantage que de la randonnée : dites-vous bien que l’itinérance n’est qu’un prétexte pour découvrir une région. L’une des richesses de la vallée de la Dordogne est de pouvoir offrir au marcheur des activités en marge de la seule randonnée. A condition d’avoir le temps devant soi et la curiosité de sortir du strict cadre de l’itinérance. Parmi celles-ci, une promenade en gabarre à Argentat, de la via-ferrata, du canoé et du paddle à Roche-le-Peyroux mais également une étape complète de 11 kilomètres en kayak ! Très appréciable, à mes yeux, ces petites parenthèses qui animent l’itinérance et qui offrent une autre perspective sur le territoire parcouru. N’hésitez pas à en profiter !

La traversée de la Diège à gué : un passage aventureux en attendant la future passerelle (contournement possible par la route actuellement)

– INFOS PRATIQUES –

Carte : il faudrait assembler plusieurs cartes IGN pour reconstituer l’ensemble de l’itinéraire. Certaines se superposant de façon peu pratique avec seulement un tout petit bout concerné. Les extraits concernés sont présents dans le topo-guide. Rapporté au coût d’acquisition d’une carte IGN, mieux vaut ici se procurer le topo ! Je ne touche pas de commission sur la vente de ce topo je précise ! C’est juste du pragmatisme, un souci d’économie et un gain de place dans le sac ! Vous en faites ce que vous voulez !
Accès : en voiture, depuis Paris, A10 jusqu’à Orléans, puis A71 direction Clermont-Ferrand. Après la sortie 12.1 « Combronde », suivre par l’échangeur l’A89 direction Bordeaux. Prendre la sortie 23 « Ussel-Ouest ». Autre possibilité depuis Paris : A10 puis A71 jusqu’à Vierzon : de là prendre la direction Limoges, par A20 et rejoindre l’A89 après la sortie 46 « Perpezac ». De là rejoindre la sortie 23 « Ussel-Ouest ». Depuis Bordeaux, suivre l’A89 direction Clermont-Ferrand. Depuis Toulouse et le sud, suivre l’A20 et attraper l’A89 après la sortie 47 « Donzenac ». Dans tous les cas, prendre la sortie 23 « Ussel-Ouest », sur l’A89. De cette sortie, prendre la D979, direction Bort-les-Orgues.
Liens utiles : en tête de liste des liens utiles, celui de l’association La Dordogne, de Villages en Barrages avec tout ce qu’il faut savoir pour préparer votre randonnée. L’itinéraire est également repris sur le site de Corrèze Rando aux côtés de nombreuses autres suggestions de randonnée dans le département. Le site officiel de celui-ci c’est bien sûr Corrèze Tourisme, indispensable pour découvrir le territoire dans sa globalité.
Les hébergements : les adresses et contacts des hébergements partenaires de l’itinéraire sont listés dans un document PDF disponible en cliquant sur ce lien. La liste est régulièrement mise à jour par l’association. Rappelez-vous que cette dernière peut vous venir en aide pour planifier et réserver vos étapes.

EN BREF

Un itinéraire assurément riches de promesses, dont je n’ai fait qu’effeuiller un chapitre au cours de cette journée de marche. Néanmoins j’y ai perçu le potentiel offert aux marcheurs en quête de nouvelles découvertes, de plongées dans une nature calme et rafraichissante, sans pour autant sacrifier au plaisir de l’effort. Des points de vues bluffants, des villages accueillants, un balisage propre… Autant de qualités pour un jeune trek qui devrait rapidement trouver son public et inscrire la Corrèze dans la liste des territoires remarquables pour l’itinérance.

by-nc-ndCe reportage Carnets de Rando, sous licence Creative Commons, est la propriété exclusive de Carnets de Rando. Son usage à des fins non commerciales est autorisé à condition de mentionner son appartenance au site www.carnetsderando.net. Pour toute autre utilisation, merci de me contacter.

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6 Comments

    1. carnetsderando Auteur de l'article Répondre

      Bonjour Francis,

      Merci pour votre commentaire et l’information concernant le dysfonctionnement du lien. En effet, le lien d’origine semble ne plus exister. Je l’ai donc corrigé et redirigé vers la page d’informations des hébergements présente sur le site officiel de l’itinéraire. Bonne journée !

      David

  1. Anaïs Duhamel Répondre

    Bonjour et merci pour ce beau retour sur un sentier encore peu connu. Nous prévoyons d’en faire une partie cet été en autonomie. Est-ce qu’il est possible de bivouaquer sur le chemin ?
    Merci et bonne journée !
    Anaïs

    1. carnetsderando Auteur de l'article Répondre

      Bonjour Anaïs,

      Dans l’absolu, tout est toujours possible oui. On trouve toujours un coin pour se poser, même si c’est pas le meilleur. Mais il y a eu tellement d’efforts et de travail de fait par les créateurs de cet itinéraire pour inviter les gens à découvrir les étapes et les services associés à celles-ci que ce serait dommage de passer à côté de l’accueil des corréziens !

    1. carnetsderando Auteur de l'article Répondre

      Bonjour Philippe,

      Non je ne pense pas car l’Association qui gère l’itinéraire édite un topo-guide complet qui détaille étape par étape le parcours. À moins d’une trace pirate quelque part sur le web – qui serait bof et peu respectueuse du travail passionné réalisé par les concepteurs de ce projet – je ne pense pas que tu pourras trouver quoi que ce soit à télécharger.

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