Deuxième partie de ma route sur le Trek des 3 Vallées et une identité toute différente, résolument tournée vers les sommets. En quittant le Val de Lescun, le randonneur fait son entrée dans un univers de géants. A la fraîche sensation des estives succède la démesure grisante de l’altitude. De Lhers à La Pierre Saint-Martin, on y apprend que le massif de l’Anie peut s’aborder autrement que par le GR10 ou la HRP. Un choc visuel permanent qui s’achève en apothéose avec l’ascension du Pic d’Anie, formidable promontoire sur un Béarn revisité.
Difficulté : difficile | Longueur : 95km | Durée : 5j | Dénivelé : 6000m
– INSTANTANE –
[dropcap]A[/dropcap] la frontière entre la France et l’Espagne, les sentinelles du Val de Lescun ont façonné un paysage qui impressionne et fascine. Je les rejoins au niveau du plateau de Sanchèse, vaste espace ouvert et accueillant où se termine la piste forestière venant de Lescun. A la place du GR10, le Trek des 3 Vallées préfère un sentier discret, presque invisible, qui grimpe à l’ouest entre le Pic de la Breque et les contreforts orientaux du Petit Billare, en direction du vallon d’Anaye, le long du ruisseau éponyme. Des pelouses nues s’étirent langoureusement le long d’immenses versants, jusqu’à venir buter contre de vastes pierriers. Incroyable muraille que celle des Orgues de Camplong, révélée par un chemin en balcon magnifique, en ascension légère, totalement immersif et sauvage. Sur la route se croise la cabane de Lacure, incroyablement restaurée. Une petite merveille, perdue et isolée dans un versant guère fréquenté. Un rêve de bivouac, oublié du monde pour naufragé en montagne. Le chemin se poursuit en s’élevant sur ces grands versants où ne viennent que les troupeaux, à en croire les traces et indices collectés sur la route. L’oeil de l’Ossau pèse dans le dos du marcheur. Le géant béarnais est toujours là, visible de n’importe quel point haut du secteur. Gardien des lieux, le sommet et sa silhouette caractéristique remplissent l’horizon où que l’on se trouve.
En prenant de la hauteur, l’itinéraire du Trek des 3 Vallées se distingue non seulement par son originalité, mais aussi par sa capacité à procurer des perspectives neuves au randonneur. Une pertinente alternative au classique tracé du GR10 qui revisite le Val de Lescun et remet au goût du jour des itinéraires oubliés
La cabane du Cap de la Baitch est un carrefour de sentiers. Le mien, celui du GR10 mais aussi celui de la HRP qui descend du col des Anies, juste au-dessus. C’est en direction du Pas d’Azuns que le Trek des 3 Vallées se dirige. Les derniers mètres de cette voie royale se frayent un passage dans une barre rocheuse par l’entremise d’un beau chemin aménagé. Au bout de la route, nouvelle confrontation avec les masses imposantes de l’Anie et du Countendé, côté verso cette fois. L’itinéraire fait route commune avec le GR10 pour quelques temps encore, dans un décor entièrement renouvelé. Le calcaire crayeux et cassant s’impose. Aux pierriers et aux pelouses ont succédé des pans de falaises abrupts et des bosquets épars de résineux. C’était les Pyrénées il y a encore une seconde mais c’est dans le Vercors qu’on a soudainement l’impression d’avoir été téléporté ! Après le Pas d’Azuns, la rupture paysagère est absolument saisissante ! Les balises rouge et blanc gagnant le Pas de l’Osque sont abandonnées au profit, une fois n’est pas coutume, d’un chemin oublié et ressuscité par Gilles sur ce Trek des 3 Vallées : celui de la cabane de Camplong qui rejoint également la station de la Pierre-Saint-Martin, étape incontournable avant les grandes manoeuvres vers l’Anie.
[dropcap]I[/dropcap]ncontournable, le refuge Jeandel sert de quartier général avant l’ascension de l’Anie. Tenu depuis 21 ans par Jean Hourticq et son épouse, c’est un lieu chaleureux où rencontrer des randonneurs pour la plupart en route sur le GR10 ou la HRP. Et aussi pour savourer un verre de Jurançon face au soleil se couchant sur une mer de nuages. Un spectacle dont on ne se lasse jamais. Au-delà du domaine skiable désert, la navigation se fait presque à vue dans de hautes prairies où apparaissent enfin de timides marmottes. Gilles a fait le choix de la variante espagnole, qui contourne les Arres par l’ouest. Impossible d’aborder ce secteur de manière frontale. Immense et lardé de gouffres atteignant 1500 mètres de profondeur, les Arres d’Anie constituent un formidable lapiaz qui défend l’accès au sommet. Dans cet univers dominé par le minéral, la végétation recule mètre après mètre jusqu’à presque disparaître entièrement et ne laisser qu’une vaste mer de rocs et de blocs au-dessus de laquelle est posé, gigantesque, le Pic d’Anie.
Surnaturel paysage que celui des Ares d’Anie. Un désert minéral aussi crevassé qu’un glacier et parmi les plus grands d’Europe. Progresser dans sa périphérie est déjà, en soi, un périple de longue haleine qui propulse le randonneur sur une planète où le caillou est roi. Pas d’ombre, pas d’arbre. Le caillou s’impose à perte de vue. Une austérité qui donne toute sa valeur au paysage
Aucune difficulté particulière dans cette ascension. En venant du col des Anies, une courte cheminée doit être empruntée mais, en venant par le Chemin des Espagnols, rien de tout ça. Il n’y a qu’à suivre le sentier et avoir encore un peu de jus pour venir à bout de ces ultimes mètres de dénivelé passés dans un dénuement absolu. En venant de l’océan Atlantique, l’Anie est considéré comme le premier sommet important sur la route de la traversée des Pyrénées. L’Orhy – visible à l’ouest – premier 2000m, est une simple formalité à côté. Ultime difficulté du trek, l’ascension du Pic d’Anie est définitivement le crux d’un itinéraire à grand spectacle, l’endroit parfait pour un magistral point final. Au sommet on a rendez-vous avec l’extase. D’abord parce que s’y distingue quasiment l’intégralité de l’itinéraire parcouru depuis Laruns. Ensuite parce que s’y dévoile la chaîne des Pyrénées jusqu’au Vignemale. Tous les grands de cette première moitié du massif sont là : Ossau, Balaïtous, Pic du Midi de Bigorre, Lurien… La fratrie espagnole est visible elle aussi, plus lointaine, plus brumeuse mais cependant bien présente. Le bassin d’Aquitaine s’étend, quant à lui, à perte de vue vers le nord, noyé sous des nuages qui s’entre-déchirent. L’heure est à la satisfaction et à la contemplation. L’apothéose d’un trek quatre étoiles.
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– INFOS PRATIQUES –
Carte : IGN 1/25000 TOP25 1546ET Laruns, Gourette – 1546OT Oloron Sainte-Marie – 1547OT Ossau, Vallée d’Aspe
Accès : en voiture, depuis Toulouse, autoroute A64 direction Tarbes, Pau. Sortie 11 et suivre la direction de Saragosse et Gan puis direction Laruns sur la D934. Depuis Bordeaux : A65 Bordeaux-Pau ou N10 jusqu’à Pau puis identique. Parking de 100 places gratuit à Laruns. En bus : liaisons entre Pau et Laruns. Consulter les horaires. En train : gare de Pau puis liaison bus (voir ci-dessus). En avion : aéroport de Pau-Pyrénées ou de Tarbes-Lourdes puis liaison.
Topo : l’itinéraire est proposé pour le moment en circuit accompagné par l’Office de Tourisme d’Ossau. Une version « en liberté » verra peut-être le jour prochainement. Un topo-guide papier de l’itinéraire devrait être créé pour cette occasion.
Notes : le trek des 3 Vallées est un itinéraire sportif. Pas technique mais physique. Avec près de 1000m de dénivelé ou plus quotidiens, il ne s’agit pas d’arriver sans entraînement ! Ne le choisissez pas comme trek de début de saison. Quelques randos à la journée de plus de 1000m de dénivelé en montagne sont recommandées avant de s’y engager. Avantage : le portage des bagages est proposé par l’organisation. Ce qui permet de marcher léger et de profiter pleinement du paysage. L’ascension du Pic d’Anie n’est pas difficile. Elle est justement longue et il peut vraiment faire très chaud dans les Arres. Prenez de l’eau en conséquence et de la crème solaire !
Les hébergements : le trek est proposé en formule pension complète, incluant nuit en gîte ou hôtel, repas du soir, petit-déjeuner et pique-nique le midi. Sur ces nouvelles étapes, vous ferez halte au refuge Jeandel, la halte montagne et randonnée incontournable à La Pierre-Saint-Martin. Si vous y allez avant la fin du mois, vous y serez encore accueillis par Jean et son épouse qui tiennent le refuge depuis 21 ans. Mais c’est leur dernière saison ! La retraite est pour début septembre. Après cette date, c’est leur fils et sa compagne qui prendront le relais ! A noter que l’itinéraire initial proposait la descente jusqu’aux Chalets d’Issaux. Une option qui ne sera probablement pas retenue pour le tracé définitif. Nonobstant cela, je vous invite cependant à découvrir ces chalets lors d’une autre visite dans le Béarn. Le lieu est idyllique et les infrastructures modernes et confortables. Un point de chute parfait pour sillonner les alentours !
Liens utiles : le premier site à visiter est le site de l’Office de Tourisme de Laruns pour pouvoir vous inscrire à ce trek. Les prochains départs auront lieu les 12 et 26 septembre prochains. Possibilité également de le faire sur le site de Gilles Bergeras, l’accompagnateur sur ce trek des Trois Vallées. Pour découvrir la vallée du Barétous et le secteur de la Pierre Saint-Martin, rendez-vous sur le site de l’Office de Tourisme. Pour des informations plus globales sur le département des Pyrénées-Atlantiques, rendez-vous sur le site du Comité Départemental du Tourisme.
Bibliographie : Le Béarn… à pied | C’est la 2ème édition du topo-guide officiel édité par la Fédération Française de Randonnée Pédestre. 20 itinéraires de Promenade & Randonnée y sont recensés, notamment sur le secteur des 3 Vallées, si vous souhaitez aller plus loin dans votre découverte de ce territoire, accompagnés de leurs cartes et de leurs explications. Prix indicatif : 9,50 € | Ref.P641
EN BREF
Sensationnel ! Pas d’autre adjectif pour qualifier ces dernières étapes ! Après un échauffement dans les estives, on attaque la section montagne de ce trek. Des étapes qui tiennent leurs promesses. Coup de coeur pour le sentier entre Anaye et le Pas d’Azuns et grand moment au sommet du Pic d’Anie. Un trek magistral !
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