Tour du Viso format XL : un classique en version longue

Tourner autour d’un sommet reste assez factuel. Mais le Viso n’est pas n’importe quel sommet. Du haut de ses 3841m il dépasse d’une large tête tous ses voisins et se targue ainsi d’être l’ultime sommet d’importance de l’arc alpin. En faire le tour constitue donc une expérience vibrante, presque un pèlerinage, et est aujourd’hui considéré comme un classique de l’itinérance alpine. Dans cet article c’est à un tour élargi et non officiel de près de 60 kilomètres que je vous convie. Une proposition que je serai peut-être amené à faire évoluer après de futures nouvelles prospections conduites autour du Viso et qui seraient susceptibles de donner lieu à des variantes intéressantes. Pour l’heure, voici déjà un Tour du Viso largement complet pour vous faire découvrir, avec quelques variantes et prolongations, ce secteur mythique des Alpes Cotiennes .

Difficulté : assez difficile | Distance : 57 km | Dénivelé : 4280m | Durée : 3/4 jours

Note : les photographies de ce dossier ont été réalisées lors de deux treks distincts autour du Viso : l’un en septembre 2021 et l’autre en juillet 2022. Un écart de saison qui explique les variations de couleurs et de végétation ainsi que la présence de participants différents.

LE CHOIX DU POINT DE DÉPART

Sous l’étreinte brûlante d’une chaude après-midi d’été, le goudron de la route du col Agnel exhale de l’odeur puissante des freins surchauffés des véhicules. Avec sa route propre mais étroite, ses lacets plus serrés que ceux d’un corset italien du 16ème siècle et ses kilomètres finaux à 10% de moyenne, le col Agnel met à l’épreuve les conducteurs et leurs mécaniques.

Après un peu plus de quatre heure de route depuis la Provence, voiture et passagers accueillent avec soulagement l’arrêt définitif du moteur sur l’un des quelques emplacements de stationnement dégagés autour d’un lacet arrondissant au-dessus des Granges del Rio.

Le Vallon de Soustra et le lacet du départ au niveau des Granges del Rio

C’est le point de départ que j’ai finalement choisi pour cette version élargie du Tour du Viso. Côté italien plutôt que côté français. Depuis leur classement en Réserve Naturelle en 2007, l’accès aux espaces dévalant en faces nord du Pic d’Asti et du Mont Aiguillette a, en effet, été rigoureusement interdit. Pas uniquement le bivouac mais carrément toute intrusion hors sentier balisé. Suffisant, donc, pour me faire renoncer à une traversée entre Brèche de Ruine et lac Lestio en partant du col Agnel ainsi que de vagues souvenirs d’une époque avec l’UCPA me l’avaient initialement inspiré.

Pas question non plus de démarrer depuis la vallée du Guil et la Roche Écroulée, ni plus ni moins qu’une répétition du tournage de l’automne précédent – qui a donné lieu à un film réalisé pour le Parco Monviso et visible ci-dessous – doublée d’une marche de fond de vallée sans grand intérêt. Deux raisons auxquelles s’ajoute la difficulté d’un retour dans le temps imparti, surtout avec l’ambition de crocheter par la Haute-Ubaye. Le vallon de Soustra et le Passo della Losetta seront donc notre ticket d’entrée au pays du Viso.

BIVOUAC OU REFUGE ?

Les deux sont tout à fait possible et j’ai chaque fois indiqué les options disponibles dans le descriptif du parcours. Le tour du Viso est plutôt bien loti en matière de refuges : on peut dormir en dur sur toute sa longueur, y compris dans la version élargie que je propose dans ce dossier. Ça reste une question de convenance, de poids à porter et aussi de budget !

Il y a également les cabanes qui restent une solution intermédiaire mais sur lesquelles on ne peut pas compter à coup sûr dans la mesure où leur capacité d’accueil est limitée et aussi qu’on ne peut pas les réserver. L’autonomie reste mon choix numéro un par la liberté et l’immersion qu’elle procure. Le prix à payer est le poids du sac et une complexité logistique forcément plus importante. J’ai fait mention dans l’article des spots où j’ai bivouaqué.

Bivouac face au Viso, à proximité du refuge Giacoletti

À QUI S’ADRESSE LE TOUR DU VISO ?

Si vous partez en autonomie, je vous recommande d’être déjà un peu familier de la marche en montagne sur plusieurs jours pour vous confronter au tour du Viso. L’itinéraire classique – sans variante alpine – déroule bien et sur de bons sentiers toujours parfaitement balisés. Il peut donc constituer un trek intéressant pour qui peaufine son expérience de l’itinérance en montagne avant des objectifs plus sportifs et/ou techniques.

La version élargie du Tour du Viso proposée dans cet article comporte un passage technique et somme toute assez engagé – le Couloir du Porc – qui nécessite d’être à l’aise avec des segments moyennement gazeux et de savoir progresser en vertical avec des aides (comme en via ferrata). Elle inclue également une étape où l’orientation est plus précaire – du fait d’un balisage moins bon – et le dénivelé plus soutenu. Elle s’adresse donc à des trekkeurs un peu plus expérimentés, physiquement et techniquement.

RECOMMANDATIONS PARTICULIÈRES

Alors le tour du Viso a une vraie particularité qu’on appelle ici la nebbia. C’est un mot italien désignant un phénomène météo se produisant quasi quotidiennement et qui fait que, dès la fin de matinée (voire parfois avant), la mer de nuages qui stagne sur la plaine voisine du Po monte en altitude et noie toute la montagne dans la brume.

C’est donc pas mal pour les marcheurs/ses de ne pas partir trop tard le matin pour éviter de naviguer dans la purée de pois dès dix heures ! Il faut avouer que c’est parfois un peu pénible car ça gâche un peu la vue mais c’est ainsi. Le phénomène est davantage marqué côté oriental du massif. Sur un strict plan de sécurité, je ne vous recommande également de ne pas de tenter les variantes alpines dans la nebbia…

La nebbia portée par la mer de nuages côté italien : tantôt amie, tantôt ennemie !

SAISONNALITÉ

Le terrain et l’altitude souvent élevée de ce trek contraignent forcément la fenêtre de pratique. La neige reste facilement présente jusqu’à la mi-juin, parfois au-delà, et s’invite dès la fin octobre sur les sommets. L’ouverture des refuges s’aligne en général sur cette période avec une fermeture généralement constatée fin septembre. Le temps d’ensoleillement et les températures sont également plus favorables de la fin du printemps au début de l’automne, en particulier si vous briguez l’autonomie. Bref, on est en montagne et, à moins d’être très soigneusement équipé et habitué aux conditions hivernales, il est recommandé de pratiquer le Tour du Viso de la fin juin à mi-septembre.

DÉCOUPAGE DES ÉTAPES

Je n’ai pas souhaité imposer un découpage particulier à cet itinéraire. J’ai préféré vous le décrire dans sa continuité en indiquant les temps de marche, la distance et le dénivelé entre chaque point tout en faisant mention des possibilités d’hébergement ou de bivouac disponibles. Libre ainsi à chacun(e) d’organiser son itinéraire en fonction de son niveau, de son choix de progression et de la durée allouée à ce trek.

CARTES / GPX

J’ai utilisé deux cartes pour ce trek. La première c’est l’incontournable TOP25 1/25000è de l’IGN. La référence à avoir c’est la 3637OT – Mont Viso, Saint-Véran, Aiguilles, PNR du Queyras. La seconde c’est une carte italienne que m’avait filé les gardes du Parc lors de notre tournage et qui est éditée par Geo4Map et qui cartographie tout l’itinéraire classique mais pas entièrement mon itinéraire élargi. D’où l’utilité de l’IGN en complément. Par contre impossible de la trouver en ligne cette carte italienne… La seule alternative c’est la carte 106 de l’Instituto Geografico Centrale au 1/25000è qui semble couvrir le secteur concerné.

Autrement la trace GPX de l’itinéraire, pour celles et ceux qui sont adeptes de ce truc, est disponible sur mon compte Outdoor Active : Tour du Viso XL

VIDÉO

En septembre 2020 le Parco Monviso m’avait demandé de réaliser un film sur le parcours classique du Tour du Viso. J’ai donc embarqué l’ami Olivier et son drone et on est parti à trois avec Francesco, un marcheur italien bilingue, faire des images sur ce magnifique tour. Dans cette vidéo on se borne à l’itinéraire traditionnel : vous n’y trouverez donc pas d’images des variantes ou du crochet par la Haute-Ubaye mais ça devrait déjà vous donner un bon premier aperçu de l’ambiance paysagère, des émotions associées et de ce qu’est la nebbia !

TOUR DU VISO XL : LE PARCOURS PAS À PAS

Des Granges del Rio au Passo Losetta

2h45 / +860m / 6,5km

Le vallon de Soustra se présente sous la forme d’un long corridor d’alpages à l’ouverture généreuse que ferme, dans le lointain, la masse indolente de la Pointe Joanne. Le trait clair d’un chemin bien dessiné remonte patiemment ses étages bien marqués et ponctués, dans une première partie, par des bergeries en pierre passablement ruinées. C’est un bel espace, à l’allure hospitalière, qui tourne assez rapidement le dos au brouhaha de la vie des hommes là-bas, derrière soi, sur le bitume de la route du col Agnel.

Ambiances au départ du Vallon de Soustra…

C’est dans ce vallon que se cherchera – avis aux amateurs/trices – la voie d’accès au sommet de la Montagnette, culminant loin au-dessus de versants herbeux à l’allure certes débonnaire mais à la pente néanmoins soutenue. Pour le marcheur en route pour le Passo della Losetta le sentier balisé toujours visible offre, pour sa part, une alternance équilibrée de plats roulants et de grimpettes de verrous plus sportifs, quoique rarement très longs. Un terrain d’échauffement idéal pour démarrer ce trek qui plonge très rapidement le randonneur dans une belle ambiance de montagne.

Un espace généreux et accueillant pour les premières heures de marche et, pourquoi pas, pour un bivouac ?

Aux abords des 2500m, le vallon de Soustra se referme progressivement tandis que se rapproche une ligne de crête constituée de reliefs déchiquetés où apparaissent les sommets de la Rocca del Castello ou encore de la Punta Seras. Les différentes sources du torrent qui galope joyeusement dans le pli du thalweg y prennent leur élan parmi des zones humides tapissées de linaigrettes. Une zone à proximité de laquelle l’option de poser un bivouac pourra être retenue selon son découpage et son degré d’autonomie sur ce Tour du Viso.

À partir d’ici, des coulées de roches et des affleurements plus marqués viennent recouvrir, progressivement d’abord puis définitivement ensuite, la couverture verdoyante des alpages. C’est dans l’une d’elles que la trace se fraye un passage régulier et sans autre difficulté que sa pente raisonnable jusqu’à atteindre le col à 2885 mètres d’altitude, théâtre attendu du premier face-à-face avec le Viso.

Option : la Pointe Joanne

Depuis le col il serait dommage de ne pas laisser les sacs – à bien planquer derrière des amas de rochers à main droite – pour s’offrir le sommet, à 3052m, de la Pointe Joanne (ou Monte Losetta en version originale) accessible au prix d’un effort modéré et d’un sentier très facile. Le tout empaqueté en 25mn et moins de 200m de dénivelé : autant le dire trois fois rien. Vous pourriez même y croiser le troupeau de bouquetins dont c’est le terrain de jeu.

Voilà de solides gaillards aux cornes épaisses qui se laissent approcher de très près. La cerise sur le gâteau d’un panorama qui vaut largement le coup d’œil tant sur la masse impressionnante de la face nord du Viso d’une part que sur la naissance de la vallée du Guil de l’autre, surmontée par les Pointes d’Udine, de Venise et de Marte. En se retournant on y apprécie également la vue sur les crêtes menant à la Montagnette puis, plus loin encore, jusqu’à l’Asti. Un pas de côté hautement recommandable sur cet itinéraire.

Du Passo della Losetta au Passo di Vallanta

45mn / +90m / 2km

Depuis le col, le sentier bascule et part en descente à droite, dépassant rapidement les restes éventrés de ce qui fut un jour la caserne Vallo Alpino. Plus bas, un panneau invite à partir à gauche, au fil du sentier U13 en direction du Passo di Vallanta/Col de Valante. C’est une trace oscillante, à flanc, parfois un peu minimaliste, qui monte et descend pour franchir au mieux la face sud-est sévèrement accidentée de la Pointe Joanne. Un parcours un poil moins fluide que jusqu’alors mais qui offre une vue imprenable sur l’imposante silhouette du Mont Viso qu’épaule la table couchée du Viso di Vallanta (ci-dessous). On y repère également parfaitement, en contrebas, le lac et le refuge éponymes, sur le tracé classique du Tour du Mont Viso.

Note : depuis le col de Valante, il est possible de rejoindre plus rapidement l’Italie pour le refuge Giacoletti ou Quintino Sella en empruntant l’itinéraire dit « alpin » qui franchit le col du Colonel/Passo del Colonnello. Le passage est réservé aux marcheurs/ses expert/es et habitué(e)s au terrain montagne ; autrement dit à progresser dans des pierriers et des passages rocheux possiblement engagés, voire nécessitant des pas d’escalade (avec ou sans aide en place). Je n’ai pas encore pratiqué ce passage, je ne peux donc pas vous faire de retour plus précis. L’article sera mis à jour dès que cela aura été fait.

Du Passo di Vallanta au refuge du Viso

1h20 / +50m / 3,5km

Le col de Valante présente un aspect lunaire. Une trouée grise de dalles lisses et de pierres pulvérisées ouvrant sur le Queyras et sur, notamment, la silhouette en forme de dent du Pic Traverse. Balisée aux couleurs jaune et rouge du GR® de Pays du Tour du Pain de Sucre, la trace entre en France et entreprend de traverser un assez vaste pierrier pour atteindre, 300m en contrebas, le confidentiel petit lac de Lestio. La caillasse bat ici en retraite tandis que s’ouvre à nouveau un sentier plus « roulant » qui, après un pont sur le Guil balbutiant, s’engage à droite à travers les pelouses alpines pour patiemment s’élever en direction du refuge du Viso, terminus possible d’une journée de marche.

Hébergement : le refuge du Viso

Le refuge du Viso, c’est le jour et la nuit avec ses homologues italiens. Ici pas de wifi, pas de recharge pour les téléphones, pas de groupe électrogène le soir. De la gestion de l’énergie à celle des déchets en passant par celle de l’eau, le refuge est pilote en matière de transition en site isolé. Bénéficiant de la marque Valeurs Parc Naturel Régional il s’inscrit dans une démarche de développement durable. D’aucun lui reprocheront une identité tirant vers la sobriété là où, à l’inverse, d’autres salueront cette volonté de faire entrer les refuges dans une nouvelle ère. À chacun de voir ! Tarif : 57,80 euros la demi-pension. Infos et réservations : https://refugeduviso.ffcam.fr/home.html

Du Refuge du Viso au refuge Giacoletti via le Couloir du Porc

2h / +460m / 2,5 km

Un balisage jaune tourne le dos au refuge pour à nouveau accrocher le Viso en ligne de mire. Il s’applique alors à suivre un sentier à flanc rectiligne qui se dirige vers la base d’une coulée pierreuse s’évasant en-dessous du rognon rocheux correspondant à la cote 2701 de l’IGN. Une fois atteinte et dépassée, le marquage rejoint rapidement le petit lac de Porcieroles (ci-dessous).

Au-dessus du déversoir se dressent les massifs sommets de la Montagnette et du Mont Ruine, défendus de ce côté-ci par une série de barres rocheuses plutôt inhospitalières. Au-delà du lac, les traces jaunes entrent dans le champ de bataille d’une large combe pierreuse dont le contenu grossier semble alimenté par le raide couloir bordant, à droite, le sommet de la Pointe d’Udine.

Le petit lac Porcerioles qu’on dépasse sur la route menant au Couloir du Porc

La progression ralentit dès lors, du fait du terrain et de la pente qui s’accentue nettement, malgré la présence étonnante d’un chemin parmi les blocs. Un œil exercé aura peut-être préalablement repéré la grosse flèche jaune peinte sur un tout aussi massif rocher et dont le but est d’aiguiller le marcheur essoufflé en direction du bon couloir.

En l’espèce il s’agit ici d’un passage orienté nord, pas mal bavant mais praticable, qui vient finalement buter dans l’étroiture d’une cheminée où se dévoilent une volée de barreaux métalliques. Une aide bienvenue pour prendre pied sur le plan incliné caillouteux qui dévale entre la Pointe d’Udine et celle de Venise et au sommet duquel baille l’ouverture béante du Couloir du Porc en bas duquel attend le refuge Giacoletti.

Le Passage du Couloir du Porc

Si vous avez trouvé le versant français du Couloir du Porc raide, attendez de voir à quoi il ressemble chez nos voisins transalpins ! Le couloir y a davantage des allures de goulet impraticable à gauche duquel se taille tant bien que mal un passage alternant entre vires étroites et ruptures de pente verticales nécessitant l’emprunt de passages équipés. Une ligne de vie prenant la forme d’un câble en acier s’y découvre régulièrement pour rassurer les plus fébriles. Pour peu que la nebbia s’y déploie en panaches grisonnants, le Couloir du Porc vous apparaîtra alors peut-être comme un décor de film d’aventure pas mal sinistre.

Les habitué(e)s d’escalade et de via ferrata en toucheront cependant le pied sans s’être aperçu(e)s de rien – ou presque. Les autres, en revanche, devront gérer leur stress et prendre le temps nécessaire pour s’acquitter de cette descente brutale mais diablement excitante qui n’excède pourtant pas les 200 mètres ; descente rendue potentiellement plus difficile par le poids des sacs. Les passages plus gazeux que le reste, au nombre de trois, se franchissent grâce à des marches et des chaînes indispensables. Selon la largeur de votre zone de confort, ça engagera plus ou moins d’une personne à l’autre.

Peut-on éviter le Couloir du Porc ?

Réponse : oui. Mais ne pas passer par le Couloir du Porc va imposer un sérieux détour puisque la seule solution consistera à emprunter le tunnel de la Traversette, sur l’itinéraire classique du Tour du Viso. Une fois en Italie, on entame la descente vers Pian del Re avant de la laisser, plus bas, pour suivre à droite un chemin balisé ramenant vers Giacoletti. Un détour de plus de trois heures au compteur pour un peu moins de 700m de dénivelé. À prévoir en amont de votre préparation pour éviter les mauvaises surprises sur le terrain !

Hébergement / Le refuge Giacoletti

Le refuge Vitale Giacoletti, avec ses volets jaunes et sa belle pierre grise, est un repaire de grimpeurs. Même si on y croise du monde lancé sur le Tour du Viso, on y rencontre aussi beaucoup de personnes y passant plusieurs nuits le temps d’écluser les nombreuses possibilités de grimpe réparties autour du refuge. Outre les accès assez engagés aux sommets des Pointes d’Udine et de Venise, les environs immédiats du refuge concentrent également quelques grandes voies sympathiques pour aller taquiner ces sommets autrement qu’avec ses seuls pieds. L’équipe du refuge, partiellement constituée d’adeptes de l’escalade, sera donc de très bon conseil pour répondre à vos questions sur les différentes possibilités de grimpe – facile à experte – autour de la zone. La demi-pension est à 54 euros. Le refuge totalise 56 places. Infos et réservation : https://www.giacoletti.it/ Il est également possible de bivouaquer à proximité du refuge.

Du refuge Giacoletti au refuge Quintino Sella

3h / +355m / 7km

Je ne pense pas exagérer en affirmant que la vision du Mont Viso depuis Giacoletti soit l’une des plus puissantes qu’il soit donné d’admirer sur l’ensemble du tour. De ce côté de la frontière et sous cet angle, cette projection rocheuse lancée à la conquête du ciel se pare d’un authentique aspect himalayen. Le rapport de force entre le colosse italien et la silhouette humaine, accentué par la perspective, tend à transformer le sommet en divinité. Une fantasmagorie probablement due à la présence de quelques drapeaux à prière tibétains qui ne peuvent qu’en ajouter à l’illusion. Au-delà de ça, cela reste une de mes images favorites sur ce Tour du Viso. Et si, comme moi, vous avez la chance d’y assister au lever du soleil, vous ne pourrez qu’abonder – je pense – dans le sens de mon enthousiasme fasciné.

La masse du Viso, les drapeaux à prières et la lumière matinale : une vision échappée de l’Himalaya

C’est un décor de rêve qui accompagne le marcheur sur cette section. Les murailles rocheuses se déployant jusqu’à la Pointe Gastaldi d’un côté, l’éclat des lacs en contrebas de l’autre, l’ouverture immense sur la plaine du Po grignotée par une mer de nuages… Tout est prétexte à s’émerveiller au fil d’un sentier propre qui perd de l’altitude pour s’en aller, plus tard, dominer le petit Lago Lausetto d’abord, puis la goutte émeraude du Lago Chiaretto ensuite. C’est un point de convergence pour plusieurs sentiers conduisant à Quintino Sella et il n’est pas rare de récupérer, à partir d’ici, des groupes de randonneurs s’attaquant à la montée vers le Colle del Viso, le morceau de bravoure de ce segment.

Sans la nebbia, la progression dans les espaces bordant la face est du Viso est remarquable

Ici, dans ces étages inférieurs du Viso, la pierre sous toutes ses formes s’impose dans le paysage. Une identité visuelle mais également sonore : ne soyez pas surpris d’entendre très fréquemment des chutes de pierres se produire dans les lointains couloirs striant les falaises. Le Viso est une montagne vivante qui cède chaque jour davantage à la pression de l’érosion. Tout ne devient très vite plus que roches brisées, étendues de pierriers chaotiques et murs gris à l’allure menaçante.

Un capharnaüm au milieu duquel la trace s’élève patiemment jusqu’à s’engouffrer dans le large corridor tendu entre les falaises et le Viso Mozzo. Le col apparaît au loin, étirant une courbe douce au débouché de ce fracas de blocs dont la traversée, un poil pénible, réclame un ultime effort. Au-delà se dévoile la forme régulière et la surface platine du Lago Grande di Viso, surmontées par la silhouette massive du refuge Quintino Sella.

Hébergement : le refuge Quintino Sella

À 2640m d’altitude, posé au pied de la grande muraille de la face sud du Viso, le refuge Quintino Sella est une institution du Tour du Viso. Plus qu’un refuge c’est d’abord un lieu de vie animé toute la journée. À l’instar de Giacoletti, on peut y admirer d’incroyables lever de soleil qui embrasent littéralement la montagne. Il porte le nom du premier italien à avoir atteint le sommet du Viso. C’était en 1853. Le refuge actuel date de 1905 et peut accueillir plus de 80 personnes.

Situé à un emplacement stratégique, il dessert les étapes du Tour du Viso ainsi que l’ascension du sommet par sa voie normale ou l’arête Est. C’est une gestion familiale portée par un sincère amour de la montagne et de l’endroit. La nuitée y est au tarif de 30 euros (moitié moins pour les adhérents du Club Alpin Italien) et la demi-pension à 53 euros. Infos et réservations : https://www.rifugiosella.it/fr/

Du refuge Quintino Sella au Passo Gallarino

1h15 / +150m / 3,5km

Au-delà de Quintino Sella, le mur de roche qui prolonge le Viso au sud perd de l’envergure, s’achevant un peu plus de trois kilomètres plus tard après le sommet de la Punta Trento, 2970m d’altitude, soit près de 1000m en-dessous de celui du Viso !

Moins impressionnant ne signifie cependant pas pour autant plus simple : les candidat(e)s à la voie normale du Viso devront en effet s’acquitter d’une grimpette soutenue puis du passage d’une via ferrata s’ils veulent atteindre ensuite le bivouac Forciolline, point de chute établi de l’aventure. Un périple dont j’essaierai de vous parler une prochaine fois, dans un article distinct de ce Tour du Viso.

Sur l’itinéraire, entre Quintino Sella et le Passo Gallerino avec le Viso en arrière-plan

Les marcheurs/ses sur le Tour du Viso se contenteront donc eux de lever un regard admiratif vers les 3841m du géant de ces Alpes Cotiennes à qui ils tourneront progressivement le dos pour évoluer, désormais, dans d’agréables moutonnements entre lesquels s’aperçoivent quelques lacs de taille modeste.

La trace s’enroule ensuite autour de reliefs aux courbes douces, prenant lentement de l’altitude jusqu’à venir cogner contre une dernière rampe dont le franchissement libère le passage du Passo Gallerino, face au remarquables groupe montagneux se déployant autour de la très dolomitique Cima delle Lobbie.

Option Bivouac

Une fois encore, selon votre mode de progression et le découpage de vos étapes sur ce Tour du Viso, vous pourrez être tenté de poser le bivouac de l’autre côté du Passo Gallerino, sur cette accueillante zone ouverte où apparaissent quelques petits lacs sympas. On l’a fait et on a été agréablement surpris de la protection offerte par l’endroit contre la nebbia. On y a aussi croisé et observé des hardes entières de bouquetins venus y brouter et s’y désaltérer. Par contre pas d’eau potable. Venez avec de la réserve ou avec un filtre.

Du Passo Gallerino au Lago Bertin

2 km / 40m D+ / 35mn

Une trace ascendante se dévoile parmi un empilement de blocs rocheux, s’enroulant sous le versant sud de la Punta Trento en direction du Passo San Chiaffredo. Bienvenue sur la Lune, semble ici vouloir dire un décor débarrassé – du moins en surface – de toute végétation. Partout où se pose le regard n’est, dans cette sphère, que caillou. Une présence hégémonique qui propulse le marcheur dans un univers au charme abrupt et anguleux où des pierriers se déversent le long de chaque versant, inondant chaque combe de coulées grisonnantes.

Des sommets à l’allure lacérée y jouent les sentinelles, imposant une présence forte derrière des lambeaux de nuages. C’est dans ce décor austère et immense que se dissimule un autre accès vers le pied du Mont Viso. Une trace fragile et complexe, camouflée dans une mer minérale, qui conduira le visiteur opiniâtre d’éboulis en cheminée vers le passage étroit du Colletto Dante, taillé entre la pointe du même nom et la Pointe Michels. Une aventure dans l’aventure pour celles et ceux à la recherche de belles variantes pour courtiser le Viso.

Les décors radicalement minéraux traversés sur ce segment de l’itinéraire

Au fur et à mesure que s’estompe la masse imposante du bloc de la Punta Malta à main gauche, l’horizon retrouvé des sommets de la Varaita refait son apparition dans le lointain, premier signe que l’amorce de la boucle retour est lancée. Le sentier continue d’onduler comme un long et mince reptile dans un paysage minimaliste, traversant plus loin une forêt de cairns que d’aucun pourrait comparer à un cimetière.

Puis vient la surface platine du Lago Lungo, oasis inattendue dans le chaos fascinant de ce reg alpin, posée un étage au-dessus du Lago Bertin, son jumeau par la forme mais son cadet par la taille. C’est à cet endroit que s’ouvre le passage vers la vallée suivante et, avec, lui la promesse d’une longue dégringolade vers le vallon de Vallanta.

Option Bivouac

À noter qu’au-dessus du Lac Bertin, à seulement 10 minutes de marche, il est possible de rejoindre l’une de ces géniales cabanes de bivouac italiennes, posée sur un mamelon et face à un paysage d’exception. Une très bonne option selon le découpage choisi et qui pourra s’avérer très utile en cas de mauvais temps sur votre Tour du Viso.

Du Lago Bertin à Pontechianale

9,5 km / 65m D+ / 1170m D- / 3h30

Tout ce qui monte doit redescendre. La fameuse maxime trouve pleinement son sens sur la planète trek. Palier après palier, c’est une longue et patiente descente qui attend le randonneur après le Lago Bertin. En perdant de l’altitude, le rocher recule face au végétal qui recolonise les pentes avec avidité. L’odeur insistante de la résine suinte à travers les mélèzes qui dispensent une ombre bienvenue après l’exposition crue de la pierre en altitude. Fleurs, sonnailles, insectes, oiseaux : la vie reprend autour du sentier avec une frénésie surprenante à ces étages où survivre semble éminemment plus simple qu’au-dessus des 3000 mètres.

Une chaleur presque étouffante étreint le fond de la vallée que seule la course vive et bondissante du torrent de Vallanta traverse d’un trait de fraîcheur. À la rudesse des cimes déchirant les nuages a succédé la vision accueillante de forêts rassurantes à la frontière du monde des hommes, maintenant très proche*. Le charmant petit village de Castello, atteint au terme d’un paisible cheminement, en constitue la première étape. Le terminus, à moins de 30mn de marche, sera cependant celui, plus important, de Pontechianale, qu’on rejoint après une agréable promenade sur la rive droite et ombragée d’un vaste lac de retenue.

* À noter : à l’intersection des Granges de Gheit, il est possible de poursuivre sur l’itinéraire classique du Tour du Viso en direction du refuge de Vallanta (4,5km/520mD+/2h) en prenant à droite plutôt qu’à gauche.

Hébergement / Pontechianale

Plusieurs options possibles à Pontechianale. Selon votre budget et vos préférences, vous opterez peut-être pour l’un des deux campings qu’on trouve au débouché du chemin venant du lac. À condition, bien évidemment, d’avoir la tente avec vous. Il s’agit du camping Libac et du camping Acti Lago qui proposent des emplacements pour la nuit à moins de 10 euros. Pour celles et ceux à la recherche de confort et de standing, ce sera à l’inverse l’Hôtel-Chalet Seggiovia qui dispose de 20 chambres. Prévoyez un budget supérieur à 100 euros pour une double par contre ! En ce qui nous concerne, on a coupé la poire en deux en prenant une chambre à l’établissement Buca di Bacco. Les propriétaires font à manger dans leur pizzeria juste en-dessous et c’est étonnamment bon pour un prix très raisonnable. On a payé 74 euros la double avec le petit déjeuner et on s’en est tiré pour 40 euros de dîner à deux. Il y a d’autres restaurants sur Pontechianale ainsi qu’un petit supermarché pour faire quelques courses si besoin.

De Pontechianale au Col du Loup

7km / +1450m / 4h15

On quitte Pontechianale par le nord, après être repassé en rive droite du torrent. L’atmosphère sous les résineux se fait oisive sous le soleil du matin jusqu’à ce que le chemin se redresse furieusement en faisant grincer nos mollets. Lâchant la Varaita, l’itinéraire s’engage sans sommation dans le vallon de Fiutrusa en s’employant à se hisser au-dessus d’une gorge étroite dans les profondeurs de laquelle gronde, invisible, le torrent. Il faudra dépasser quelques granges et un premier verrou pour se mettre dans l’axe de la vallée et progressivement se remettre à niveau du cours d’eau.

Après un premier verrou glaciaire franchi, le vallon de Fiutrusa se révèle aux marcheurs

C’est dans un lacet du chemin, où s’abrite une petite chute d’eau, que le dénivelé s’affole à nouveau, se propulsant sèchement dans une colonie de résineux. Plus haut, le temps d’une trêve de la pente, on laisse à droite le sentier menant au col de Rastel pour poursuivre en direction de celui du Loup, indiqué sur des pancartes de bois fatiguées. La trace s’égare parfois, notamment à la faveur d’un lit de torrent asséché où elle se fait indécise, disparaissant pour réapparaître provisoirement sur la rive opposée, au signalement de cairns peu utiles. C’est finalement en rive gauche que des balises se retrouvent inopinément pour nous conduire à une intersection.

Un sentier s’échappe vers le sud, à l’assaut d’une pente recouverte d’aulnes, desservant le col de Bondormir. Nous lui préférerons celui poursuivant plein ouest, en ascendance encore modeste, à travers les larges espaces du vallon. Il bute plus haut sur un nouveau carrefour de traces : à gauche celle qui rejoint le col de Fiutrusa, à droite, s’élevant sur le faite d’une croupe s’arrondissant entre deux thalwegs, celle qui rallie le col du Loup, notre objectif. C’est le début d’une ascension sur un sentier oublié et peu emprunté, dont la trace manque parfois de s’effacer, dévorée par une végétation dense.

Quelques aperçus de la première partie de la longue et patiente ascension vers le col du Loup

L’écho du torrent répond au souffle du marcheur tandis qu’il s’élève sur un sentier en lacets à la régularité étonnante. Plus haut – beaucoup plus haut ! – la trace abandonne les herbes fleuries et gagne le fond accidenté d’un thalweg pour y franchir une série de barres rocheuses. Un épisode bref mais sportif qui brise le rythme de métronome choisi jusqu’alors par le parcours et qui libère l’accès aux étages supérieurs du vallon. Ce jour-là les nuages emprisonnent les sommets dans une pois à la clarté blafarde où semble retenu prisonnier le moindre son.

La pierre s’y installe à nouveau et les semelles des chaussures crissent dans des coulées de blocs immobilisées sous le col du Loup. On y égare parfois les balises présentes jusqu’à atteindre les pentes sommitales, plus raides, que la trace tente d’escalader sans déraper. Un froid humide porté par une brise sournoise nous accueille au col du Loup, lieu empreint de désolation que les ruines d’une casemate abandonnée rendent définitivement lugubre. Les stigmates de la guerre baignent l’endroit d’une douloureuse nostalgie. On y frissonne entre fascination et effroi.

Du col du Loup au col Longet

3 km / -400m / 1h10

La bascule est effectuée sans tarder tandis que des gouttes de pluie isolées s’écrasent sur les rochers alentours. Le terrain, évasé sur ce versant, est un capharnaüm de rocs et de gradins désordonnés semblable à un champ de bataille au milieu duquel auraient été peintes des balises en guise de fil d’Ariane. Le caractère isolé et sensiblement sauvage du lieu ne laisse pas indifférent. Tout spécialement quand le vent chasse les brèves averses et quelques nuages réfractaires pour laisser apparaître un univers de lacs et d’étagements lumineux.

À travers le rideau déchiré de la brume surgissent bientôt les cimes du Queyras : la Tête du Longet (3146m), le Pic de la Farnéreita (3133m) et, bien sûr, la Tête des Toilies (3177m) y occupent des places d’honneur, fermant, au niveau du col Longet, la longue vallée de la Haute-Ubaye d’où émerge également le Bric de Rubren (3340m). Le brouillard, revenu en force, nous y aspire avec le paysage avant qu’un inattendu éclat de soleil entreprenne une vaste et efficace opération de nettoyage. Vers l’est, la masse énorme du Viso émerge en fendant la chape de brume comme l’aileron du requin l’océan. Côté français, c’est toute la surface du Laghi Bes, dans son écrin minéral surmonté de sommets, qui miroite sous une lumière retrouvée. Un petit miracle.

Option Bivouac

Il me paraît utile de porter à votre connaissance que, posée à cheval entre Laghi Bes et Lago Longet, une petit cabane de bivouac se découvre, en accès libre. Elle peut accueillir entre 4 et 6 personnes et n’est absolument pas signalée sur les cartes IGN ! Le spot est juste incroyable, dominant la vallée avec vue sur le Viso en face. On l’a découverte lors de notre passage, non sans surprise, en butant presque contre elle dans le brouillard ! Et, lorsque la brume s’est levée et que le décor environnant s’est révélé, on s’est dit qu’on aurait bien aimé y passer la nuit ! Mais on avait déjà réservé au refuge de la Blanche, alors ce sera pour une prochaine fois. Mais on fait passer le tuyau !

Du col Longet au Refuge de la Blanche

4 km / +335m / -485m / 1h45

On se laisse glisser entre des talus rocheux pour rejoindre rapidement la bonne trace du GR® de Pays opérant le tour du Bric de Ruben dont on peut apercevoir le sommet, au sud-ouest, en se retournant. Nous revoici en Italie, dans les étages supérieurs de cet immense vallon arrondissant entre Rocca Bianca et Tête des Toillies dont le sentier vient caresser les pierriers du versant oriental. À l’approche d’un thalweg dirigeant les eaux d’un torrent vers la goutte sombre du petit Lac Bleu, en contrebas, un panneau signale qu’il faut quitter le GR® de Pays par la gauche si l’on veut rejoindre le refuge de la Blanche.

Une succession de paliers herbeux et arrondis y accueillent un sentier qui s’apparente par endroit à une tranchée opposant une certaine résistance au randonneur en route pour le col Blanchet. La canine géante de la Tête des Toillies y envahit l’arrière-plan, jaugeant notre effort patient et volontaire sur des pentes finales raides et définitivement débarrassées de toute demie mesure. Un appel d’air plus insistant donne le signal de l’averse. La lumière se dissout dans le gris sombre de la pierre et les nuages bas versent leurs premières larmes.

La Tête des Toillies, côté italien et français : la star du jour à cet instant du parcours

La descente se fait humide. Le Queyras nous ouvre des portes rincées par d’immenses rideaux de pluie accrochés au Pic Traversier et au sommet de Château Renard qu’un soleil couchant parvient néanmoins à tenir à distance lorsque nous atteignons finalement le refuge. Une lumière venue d’un autre monde enflamme le lieu, embrasant le reflet de la Tête des Toillies dans le miroir du petit lac de la Blanche. Fugace et spectaculaire !

Hébergement : le refuge de la Blanche

Le refuge de la Blanche c’est une affaire de famille – c’est l’un des fistons de la famille Laurans, déjà à la tête de l’agence La Vie Sauvage, qui est aux commandes. Ouvert hiver comme été, il offre un accueil incomparable. Nul ne saurait rester indifférent à la qualité des repas proposés – ainsi qu’à la petite cave permettant de boire autre chose qu’un Côtes du Rhône au pichet – ainsi qu’à l’efficacité d’une équipe rodée.

Pour moi ça fait partie de ces adresses où il ne faut pas hésiter une seconde à s’arrêter. Le refuge propose avec ça une formule campeur à 32 euros qui permet de planter la tente -la zone est à quelques mètres – tout en profitant de la demi-pension, de la douche et du petit-déjeuner. Infos et réservation : www.refugedelablanche.com

Du Refuge de la Blanche au col de Saint-Véran

2 km / +350m / 1h

Le jour a chassé la pluie et c’est un ciel purgé déployant un azur impeccable qui sert ce matin-là de couvre-chef aux sommets luisant sous le soleil. Quittant le refuge de la Blanche par le nord-est, un petit sentier se lance à l’assaut de reliefs d’herbe rase aux formes douces. Émergeant plus formidablement que n’importe quel autre sommet, la Tête des Toillies – proposant ici sa très belle face nord-ouest – efface du paysage tous les autres, éminemment moins charismatiques. L’effort n’est pas absent de l’équation pour rejoindre le col mais la douceur et la beauté du paysage en estompent les effets.

La silhouette du Pic Caramantran, l’un des 3000m les plus faciles d’accès se révèle au nord-ouest, annonçant la proximité du col. De l’autre côté de Roche Ronde, dans le vallon de Chamoussière invisible d’ici, c’est le tracé du GR®58 alias le Tour du Queyras, itinéraire phare du territoire pour les adeptes d’aventure en montagne au long cours et dont on a déjà parlé ici : GR®58 / Le Trek à l’Aise dans les Mélèzes. Un coup de barre à tribord et voici déjà apparaître le col de Saint-Véran, nouvelle porte d’échange à pied avec l’Italie. Un dernier passage de frontière avant la descente vers le point de départ.

Option Sommet : Rocca Bianca (3059m)

2,5 km AR / +225m / 1h

Il serait dommage de passer à côté de l’ascension de ce sommet aux allures de pilier imprenable dont l’impressionnante et verticale face est plonge en direction de l’Italie. Un bastion à l’aspect redoutable qui dissimule pourtant une voie normale astucieuse et ludique pour en atteindre la cime. Depuis le col, un chemin bien tracé remonte la crête-frontière vers le sud jusqu’à un point haut où sont arrimés des drapeaux à prières.

On rejoint ensuite la base du socle occidental du sommet à partir duquel des cairns guident les marcheurs sachant un peu mettre les mains au rocher – un pas où il faut réfléchir un peu – à travers un ensemble d’étagements s’enroulant autour de Rocca Bianca pour atteindre d’abord sa cime nord-est. Une bonne trace rallie alors le dernier segment abritant un couloir bien dissimulé libérant l’accès au sommet, moyennant un petit pas d’escalade facile (I/II selon l’option choisie). Descente par le même itinéraire.

Du Col de Saint-Véran aux Granges del Rio

5,5 km / -830m / 2h15

Côté italien, un sentier taille la route à travers des versants ouverts tapissés de roches détritiques et de blocs écroulés. La masse de la Rocca Bianca y émerge comme une énorme boursouflure jaillie de la crête frontière. Les coulées de pierre sont arrêtées nettes par la ligne du thalweg qui fend le large vallon et au-delà duquel ne subsiste que le vert des pelouses chauffées à blanc par le soleil de juillet.

Le chemin ondule de lacet en lacet dans un décor spacieux où Pontechianale et son lac occupent une place centrale, loin en contrebas. Au milieu d’une armada jaune de potentilles, les regards affûtés décèleront peut-être – en fonction de la saison – la présence inattendue de quelques edelweiss. La marche s’éternise au bout d’un moment. Le sentier mue en un sillon truffé d’ornières et raboté par le passage des vaches qui y forment autant de fausses pistes.

Retour dans les vallons herbeux italiens lors de la descente sous la Rocca Bianca depuis le col de Saint-Véran

Passée la barre des 2200m, il faudra prêter attention à une sente tirant plutôt à flanc, à gauche et ne surtout pas poursuivre la descente vers le fond du vallon. On rejoint ainsi le bâti militaire ruiné de l’ancien Ricovero Carlo Emanuele III à gauche duquel une sente se dévoile qui permet de rejoindre la route du col Agnel.

Les plus pressés pourront suivre la route par la droite jusqu’au parking. Les autres, après l’avoir remontée quelques mètres à gauche, trouveront des marques à droite balisant une trace assez accidentée qui permet de prendre ensuite pied sur un sentier étroit et parallèle à la route. Un passage fragile qui perd lentement de l’altitude jusqu’à finir par rejoindre le chemin du Vallon de Soustra. En suivant celle-ci à droite, on rejoint finalement les Granges del Rio. Fin de ce Tour du Viso XL !

Remarque : les informations données dans ce reportage sur le Tour du Viso engagent uniquement la responsabilité de l’utilisateur/rice sur le terrain qui saura les adapter à son niveau et à son expérience. Carnets de Rando ne saurait être tenu responsable de tout accident survenant suite à un mauvais usage de ce topo ou à une mauvaise appréciation du niveau du/de la pratiquant(e) par rapport à celui requis.
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8 Comments

  1. lexo Répondre

    Autrement la trace GPX de l’itinéraire, pour celles et ceux qui sont adeptes de ce truc, est disponible sur mon compte Outdoor Active : Tour du Viso XL

    la trace n’est pas téléchrageable

    1. carnetsderando Auteur de l'article Répondre

      Ah mince c’est la première fois que j’essayais ce système parce que je peux pas les importer sous WordPress. Je suis deg… Bon bah on va faire à l’ancienne et je l’enverrai par mail aux gens qui en ont besoin. Si tu la veux dis moi et laisse moi une adresse mail où te l’expédier le temps que je trouve un autre moyen de la mettre en téléchargement à partir du blog. Désolé pour le contretemps.

    1. carnetsderando Auteur de l'article Répondre

      C’est gentil merci ! Celui-là il est dense c’est certain ! Et encore y’a moyen que je le rallonge avec quelques mises à jour concernant de futures variantes 🙂

  2. CP Répondre

    Souvenirs, souvenirs….
    Le nom de Rocca Bianca m’a rappelé mon premier raid avec l’UCPA….
    Le refuge Quintino Sella fut le lieu d’une soirée mémorable quelques années plus tard et toujours avec l’UCPA lors d’un fantastique tour du Viso en ski de rando… J’ai toujours en tête (et dans les jambes…) la descente du pain de sucre !!!
    Merci pour ce voyage dans cette magnifique région !

    1. carnetsderando Auteur de l'article Répondre

      Ha cette belle époque où l’UCPA avait des centres dans le Queyras à Ceillac et Saint-Véran ! J’ai également découvert le Viso avec l’UCPA. C’est toujours un plaisir d’y revenir plusieurs années après pour y mener de nouveaux projets personnels, comme celui-ci !

  3. Castelly Gilbert Répondre

    Comme d’habitude tu vends du rêve !
    Le tour du Viso pour moi et 2 amis c’est début septembre 2024 en 5 jours 4 nuits sans bivouac mais on a réservé dans l’ordre refuge Vallanta, Quintino Sella, Giacoletti et Granero.
    Je préconise sac maxi 50 l .
    Que penses tu d’imperméabiliser les contenus du sac ?
    Aurais-tu des conseils particuliers ?

    1. carnetsderando Auteur de l'article Répondre

      Salut Gilbert !

      Content de te lire ici maintenant que j’ai tourné le dos à Facebook ! Belle époque que le mois de septembre pour un tour du Viso. C’est celle à laquelle on avait tourné le petit film que j’ai intégré à l’article. Concernant les sacs, 50L c’est vraiment un grand maximum si vous voyagez sans la tente, le réchaud et tout le barda du bivouac. Je crois que j’aurais essayé de descendre en-dessous, autour des 40L. Mais bon, après moi je vis avec un tee-shirt, un caleçon et une paire de chaussettes pour une seule semaine haha !

      Sur le sujet de l’imperméabilisation des sacs, je n’ai personnellement jamais opté pour des bombes, sprays ou autres trucs du genre. Je prévois une protection de pluie adaptée à la taille du sac. C’est bien d’y mettre un peu le prix car les premiers prix ont du mal à tenir toute une journée sous la pluie. Ça finit toujours par passer un peu et à « se coller » sur le haut du sac avec l’humidité. Ça m’arrivait, par le passé, de doubler en protégeant aussi l’intérieur. Au tout début j’utilisais un grand sac poubelle mais c’est un peu pénible à l’usage pour accéder aux affaires. Je préfère maintenant – et si besoin – compartimenter mes contenus en mettant dans des sacs plastique tout ce qui craint l’eau et dont je ne peux pas me permettre de me passer. Donc surtout la rechange et, éventuellement, le sac de couchage. Comme ce sont des équipements qui sont plutôt, chez moi, dans le fond du sac, il y a alors très peu de chance de les retrouver mouillés avec le cumul des protections décrites. Voilà, en général, comment je me protège de la pluie en rando et en itinérance. Mais bon, comme apparemment il ne pleut plus dans ce monde, on aura bientôt plus besoin de tout ça ! (rires)

      Au plaisir de te lire prochainement cher Gilbert !

      David

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