Garnesier : le sommet à qui il faut faire la tête

Aujourd’hui, c’est jour de Tête  ! Et histoire de s’en payer une bonne, on a mis le cap sur celle de Garnesier. Garnesier c’est ce coin méridional du Dévoluy, celui qui garde un œil sur le Buëch et sur tout ce qui arrive du sud. Un coin à chasseurs, à bergers et à curieux. Peu de personnes de passage dans le Dévouy ont l’idée de venir y user leurs semelles. Tant pis pour eux et tant mieux pour vous  ! Ici vous faites escale dans un sas préservé et mis à l’écart du tourisme. Une bulle à deux étages qui, dans sa partie haute, vous réserve un spectacle géologique qui décoiffe. Un soupçon d’aventure, le souffle de l’altitude, une ambiance qui ne laisse pas insensible  : Garnesier et sa Tête vous confient les clés d’un Dévoluy plus sauvage et méconnu que jamais. Je vous fais faire la visite  ?

Difficulté : difficile | Distance : 15 km | Dénivelé : 1215 mètres | Durée : 6h50
Carte : IGN TOP 25 1/25000è 3337 OT – Dévoluy, Obiou, Pic de Bure

UNE HISTOIRE DE MICRO-CLIMAT

Ça marche à tous les coups  ! Ou presque… Un tour de passe-passe météorologique comme on en rencontre dans les Pyrénées, entre la France et l’Espagne. Sauf qu’ici on est dans les Hautes-Alpes, à deux jours de transhumance de Gap, dans ce petit écrin de montagne qu’est le Dévoluy. Et aujourd’hui les nuages y sont bas et denses, plombant sans aucune distinction la température et le moral des troupes. On pourrait se laisser berner, refermer les volets et se resservir un café en maugréant sur une journée sans soleil. On peut aussi se motiver, charger les affaires de la journée et aller voir ce qui se passe de l’autre côté du col du Festre.

Ne vous laissez pas berner par les nuages dans le Dévoluy ! Avec un peu de chance, il fait beau de l’autre côté du col du Festre !

Le Festre c’est une frontière. Le mauvais temps à tendance à s’y heurter, bataillant soit à envahir le massif, soit à le quitter lorsqu’il y est retenu en otage. Pile ou face. S’évader de cette prison de brume vers cet ailleurs meilleur n’est alors pas une vaine chimère. Telle la lumière au bout du tunnel, le soleil attend la plupart du temps le marcheur opiniâtre qui n’a pas cédé aux sirènes du désespoir. Et, ce jour-là, à l’arrière de la voiture, j’ai pu sentir derrière moi les sourires fendre les visages de mes équipiers lorsqu’on a opéré la bascule vers les Garcins, puis vers La Cluse, notre point de départ, en abandonnant derrière nous la horde nuageuse qui faisait rempart au soleil de septembre.

Garnesier

Le sommet de la Tête de Garnesier tel qu’il apparaît depuis le col de Plate Contier

ÉCHAUFFEMENT

Au pied du socle de la Montagne d’Aurouze, La Cluse veille sur l’entrée sud du Dévoluy. Ce n’est pas la première fois que je viens ici. J’y avais même dormi, rappelez-vous, la veille de mon reportage vers le Col des Aiguilles, en 2020. C’est donc avec l’assurance de celui qui sait que je traverse le hameau pour garer la voiture sur le petit parking qui se dévoile peu après sa sortie. C’est là que se trouve le départ du chemin  : une large piste, balisée aux couleurs jaune et orange du GR® de Pays réalisant le Tour du Büech, qui surmonte le cours du Torrent de La Béoux. Notre objectif c’est la Tête de Garnesier, quelques 1100 mètres plus haut. Là aussi je suis en terrain connu. Le hasard a voulu que j’y sois monté une première fois avec Raphaèle au printemps. Je sais donc exactement à quoi m’attendre pour ce second round.

Garnesier

En route vers Plate Contier en laissant Boudelle et sa bergerie en arrière

Le vrai départ se trouve un kilomètre après le départ de la piste, là où celle-ci se scinde en deux. Un côté s’enfonçant dans le vallon isolé de l’Abéou, vers le chalet pastoral de Chazal, un autre parant à l’assaut de la forêt des Sauvas en direction du col d’Aune. C’est sur cette branche, de l’autre côté du pont, que naît le sentier qui s’élève rapidement en lacets sur un versant déjà raide. Un échauffement expédié manu militari pour atteindre sans trop tarder les vastes prairies du vallon de Pré la Pierre. Dans mes souvenirs printaniers, je revois une avalanche d’étoiles jaune vif colorer les plis alanguis de ce haut lieu d’estive. Une myriade de couleurs et de senteurs reliées entre elles par des autoroutes invisibles connues et empruntées des seuls insectes bourdonnants qui s’activent d’une fleur à l’autre. Le spectacle d’une Nature ressuscitée de l’hiver.

À mes yeux, le vallon où se déploie le sentier est le moment où l’identité visuelle de la première partie de l’itinéraire, la plus «  montagne à vaches  », se révèle.

Un peu moins de quatre mois plus tard, la fraîcheur du printemps s’est évanouie. Les étoiles brillantes ne sont plus que des moignons recroquevillés sur des tiges desséchées. L’été est passé par là, emportant avec lui les couleurs de l’arc-en-ciel pour ne laisser à l’automne que la palette de l’arrière-saison, mélange subtil et parfois incandescent, de sobriété et de lumière. Olivier fait opérer au drone son premier décollage dans ce paysage généreusement ensoleillé, collant au train de Mike qui progresse d’un pas alerte en direction du col de Lauteret. Quelques vaches jouent les prolongations dans le fond du vallon et officient comme figurantes sur notre film. La masse très esthétique du Rocher des Archers, quant à elle, grossit à vue d’œil tandis que nous rejoignons une intersection invisible sur l’IGN.

Bientôt la fin du vallon : les Archers, à gauche, et la Tête des Ormans, à droite.

LE COL DE PLATE CONTIER

Une proposition de sentier invite à rejoindre plus rapidement le col de Plate Contier par la droite  : une idée bienvenue, qui permettra d’opérer une petite boucle au retour. Le chemin en question est surtout une trace à bestiaux qui donne l’impression de venir échouer plus haut contre la cuve d’une source captée. Si je n’étais pas déjà passé par-là au mois de juin, je serais parti avec moins d’assurance à la recherche de la trace derrière le point d’eau.

À ce stade de la randonnée, la montagne impose sa présence, fermant la porte derrière elle à une première partie bucolique et, selon la saison, immensément fleurie.

Le fait est que je sais où chercher et retrouver les balises jaunes guidant les pas du marcheur jusqu’à Plate Contier s’effectue sans la moindre hésitation. Ce dernier étage, étendu sous le versant sud-est de la Tête des Ormans, se veut plus intimiste. En larges lacets réguliers, on gravit les derniers mètres pour rejoindre le col avec, tantôt devant, tantôt derrière, la présence remarquée des contreforts rocheux et volumineux qui en délimitent la bordure sud. À l’étage où nous nous trouvons, le caillou et le rocher tiennent maintenant la végétation à distance.

Le col est proche. La formation rocheuse des Archers, derrière, pourra être atteinte au retour.

À l’ouest s’ouvre le vallon de Garnesier, par lequel poursuit le sentier balisé. Il y rejoint les Chabottes, d’abord, puis le Buëch peu avant Lus-la-Croix-Haute. Pour nous, l’heure n’est pas encore à la descente  : on n’en a pas terminé avec le dénivelé. Un peu moins de 500m d’altitude nous sépare de la Tête de Garnesier qu’on aperçoit maintenant, nette et parfaitement découpée au terme de la crête qui la relie à la Tête des Ormans, côté nord de notre position. Une pancarte en bois fatiguée indique le départ du sentier, désormais non balisé, qui en permet l’accès.

Au-delà du col de Plate Contier s’ouvre la section non balisée de l’ascension. Un nouveau chapitre où le décor se réinvente entièrement.

L’effort reprend dans la pente herbeuse sud-est soutenue des Ormans, sommet qui fait le bonheur des skieurs de randonnée une fois l’hiver venu. Un crochet nous amène cependant rapidement vers le versant sud-ouest, autrement plus minéral, à la faveur d’un petit cairn bien visible sur la crête. Le point de départ d’une traversée à flanc, à travers un pierrier bien stabilisé, sur une trace claire et facile à suivre. L’extrémité de l’arête ouest de la Tête des Ormans est ainsi rejointe, libérant l’accès à un nouvel univers qui devrait faire tourner quelques têtes à celles et ceux qui le découvrent pour la première fois.

Garnesier

Grand spectacle assuré en débarquant sur le replat du Pas de l’Agneau !

ATTENTION LES YEUX !

Nous nous trouvons au niveau du lieu dit Pas de l’Agneau sur l’IGN. Aucun jeune ongulé n’est cependant visible sur cet étroit replat desservant le départ du parcours d’arête vers le sommet. En revanche, c’est la formidable ogive du Roc de Garnesier, émergeant de l’horizon, qui capture le regard. Difficile de ne pas être hypnotisé par ce sommet à la redoutable allure. Le genre qu’on veut voir de toujours plus près. Alors on s’en approche. Vous le ferez, vous aussi, vous verrez. Ce sera plus fort que vous.

Dans la famille Garnesier il y a la Tête mais il y aussi le Roc. Une grosse claque visuelle dont la découverte, au cœur d’un décor géologiquement renversant, fait une grosse impression.

Jusqu’au deuxième choc visuel qui vous arrêtera net  : le sol s’est évanoui, précipité 500 mètres plus bas. En lieu et place se tient le vide de falaises délicatement stratifiées dans des nuances de couleurs allant de la cendre à la craie. Un chef-d’œuvre géologique sans équivalent ailleurs dans le massif. Le tout rehaussé par la ligne impeccablement esthétique de la Crête du Vallon, reliant la Tête de Merlant au Haut-Bouffet que j’avais parcourue l’an passé pour Carnets de Rando. Plus hautes encore, derrière, les Aiguilles de la Rama parachèvent cet aperçu épique en dressant un ultime mur minéral effleuré par les nuages.

Le décor géologique étonnant qui est dessiné sous les pieds du/de la marcheur/se.

Garnesier

Le Roc de Garnesier (à gauche) et les Aiguilles de la Rama (au fond, à droite)

Vous avez dit splendide  ? Attendez d’être là-haut  ! Lorsque Mike et Olivier ont fini d’épuiser leur répertoire d’onomatopées extasiées, on reprend le tournage. Les captations aériennes du drone défient toute imagination, dans un contexte lumineux particulier où soleil et nuages se mêlent dans une valse infinie orchestrée par les mains froides d’un vent qui s’invite maintenant à la fête. La réalité de l’effort est fréquemment anesthésiée par des pauses contemplatives ou des séquences de prises de vue. La trace reste essentiellement claire et, dans tous les cas, évidente.

Sur l’arête menant à la Tête, on peut librement choisir de flirter – ou pas – avec les précipices. La présence du vide peut être fréquemment oubliée en restant prudemment dans le confort d’un versant herbeux.

La proximité avec l’abîme plongeant de la face est devrait ravir les amateurs d’itinéraires vertigineux à qui sera servi sur un plateau un certain nombre de spots visuellement forts pour la photo. Les autres, plus réservés à l’égard du vide – j’en tiens pour preuve vivante Raphaèle  ! – pourront quant à eux se réfugier à l’abri du versant ouest, pentu mais cent pour cent herbeux, sans avoir à s’inquiéter de cette cohabitation avec l’objet de leurs angoisses. C’est ce qui fait de Garnesier, à mes yeux, l’un de ces sommets parfaitement adaptés pour s’initier à la randonnée hors-sentier sportive. Un lieu où le risque reste en permanence maîtrisé sans sacrifier à la délicieuse sensation de fouler du pied des espaces sauvages et peu fréquentés.

Garnesier

Au départ de l’arête terminale, après le Pas de l’Agneau

Garnesier

L’arête avec, en toile de fond, la Tête des Ormans et le versant précédemment traversé

UN SPECTACLE D’ÉLÉMENTAIRES

Il n’y a en effet pas foule dans cette partie du Dévoluy. Garnesier – Tête et, plus encore, Roc – ne font pas partie de ces endroits plébiscités par le public qui vient dans le massif souvent, et en priorité, pour ses trois boss  : Obiou, Bure et, dans une moindre mesure, Grand Ferrand. Pour dire, en deux fois et à deux saisons distinctes, je n’y ai croisé qu’un couple de marcheurs au détour de Plate Contier  ! C’est loin d’être la folie là-haut  ! Une aubaine pour les quêteurs d’espace isolés en mal d’inspiration

Garnesier c’est l’assurance d’éviter les autouroutes de la randonnée. Ici peu de chance de tomber sur qui que ce soit. Les loups solitaires seront aux anges.

Le sommet ne paye pas de mine, une fois l’ultime pente franchie  : ni plus ni moins qu’une masse arrondie coiffée d’un cairn et défendue par d’immenses ravins au nord et à l’est. Mais cependant quelle vue par-delà la brutale et vertigineuse rupture de pente  ! Le Roc de Garnesier, presque à portée de main, remplit le paysage avec son profil de dent redoutable. D’ici il paraît inattaquable pour le simple randonneur. Une trace y existe pourtant qui mène, par la traversée de ses dangereuses pentes ouest, jusqu’à un passage, complexe et engagé, jusqu’à sa cime. Un défi que j’ai espoir de relever un jour prochain. Je vous tiendrai au courant !

Garnesier

Le sommet de la Tête de Garnesier

TdG

De l’autre côté de la Tête c’est le Roc, un objectif autrement plus engagé

Partout les nuages se font et se délitent, baignant dans une lumière intermittente qui éclaire sporadiquement les faces et les versants. Une ambiance d’une autre planète, entre chien et loup, qui magnifie l’austérité native du minéral. Pour les faiseurs d’images que nous sommes, c’est une bénédiction et une belle récompense des efforts consentis pour parvenir jusqu’ici. La révélation de l’horizon, aux mains d’une météo torturée, n’en est que plus grandiose. La Jarjatte, 1200 mètres plus bas, se dévoile en alternance avant d’être avalée par une coulée de brume qui vient refouler dans les cheminées ravinées escaladant Chamousset.

Du Vercors à la Provence, en passant par le Buëch, le Trièves et les Écrins : l’horizon de montagnes et de territoires au sommet de la Tête est copieux.

Le Vercors et le Buëch émergent pour leur part très largement à l’ouest, révélant Grand Veymont, Mont Aiguille, Glandasse et Jocou. La vue porte même encore plus loin que ces premiers contreforts drômois. Sans hésitation on valide les Trois Becs, le Ventoux et même, suffisamment distincts pour échapper à la confusion, les Monts d’Ardèche par-delà la vallée du Rhône. À l’opposé, les Écrins ont disparu dans les nuages. À distance plus raisonnable, le Plateau de Bure, qu’on devine dans le prolongement de l’échancrure du vallon de la Cluse, demeure un élément clé de cet immense panorama.

Garnesier

Un beau coup d’oeil sur le Dévoluy qui se poursuit au nord vers le Grand Ferrand et l’Obiou

La mer de nuages, en contrebas, qui vient se cogner contre les pentes de Chamousset

VARIANTES SUR UN PLATEAU

Le froid engendré par l’immobilité grignote peu à peu du terrain chez chacun de nous. On précipite la fin de la pause pique-nique pendant qu’Olivier rapatrie le drone, parti tourner autour du Roc de Garnesier. À ses nombreuses exclamations enthousiastes, je sais qu’on repart avec une moisson d’images sensationnelles. Garnesier est décidément le théâtre des spectacles inattendus. Je me souviens qu’avec Raphaèle, trois mois plus tôt, on y avait vu l’orage et les éclairs s’abattre sur Bure puis le Buëch tandis que notre sommet restait au soleil.

Faire de l’image en montagne, quand on a ce milieu dans le sang, c’est un authentique privilège. D’autant plus lorsqu’elle nous gratifie d’ambiances aussi surnaturelles que ce jour.

Nous étions en balcon à la frontière du cataclysme et autant vous dire que c’était un sacré show du ciel  ! Je range mes souvenirs dans le sac à dos avec le reste et entame la descente. Pas de surprise jusqu’à Plate Contier  : l’itinéraire de retour est le même qu’à l’aller. À moins de tenter la boucle aventureuse par le Pas de l’Âne, en arête ouest du sommmet, pour rejoindre ensuite Chamousset et le vallon de Garnesier. Une aventure à part entière que nous n’avons malheureusement pas le loisir de tenter aujourd’hui, faute de temps suffisant.

Garnesier

Vue depuis la descente, l’impressionnant arrondi rocheux de la Tête des Ormans. Massif !

La petite variante se fera plus bas, une fois de retour au col de Plate Contier. J’ai très envie d’aller explorer ces beaux reliefs rocheux lancés, bien verticaux, au-dessus du vallon. Ceux-là même qui nous accompagnaient dans le paysage lors de la première partie de l’ascension. Il doit bien y avoir moyen d’y faire quelques intéressantes images supplémentaires pour clôturer notre reportage. Je boude donc le tracé jaune et coupe presque droit vers un rassemblement de résineux en contrebas.

L’exploration du secteur des Archers complète la collection de bonnes surprises que nous a réservée cette randonnée au pays de Garnesier.

Une vague trace – sans doute l’œuvre des vaches  ? – permet de passer sous le rocher et de s’orienter ensuite vers le sud-ouest, en ascendance légère, en direction du col dit du Grand Vallon sur l’IGN. De là il est aisé de tirer au sud pour rejoindre la calotte des Archers, espace ouvert autorisant l’accès à l’un de ces Archers, moyennant quelques pas d’escalade assez faciles. L’instinct a payé. Le spot ne vaut certes pas Garnesier mais offre le luxe d’un point de vue en hauteur inédit sur tout le vallon du Pré la Pierre. Et la sensation, non désagréable, de fouler du pied un endroit où personne ne pense à aller.

Garnesier

Emplacement avec vue au niveau des Archers avec le plateau de Bure au fond

LE DÉBUT DE LA FIN

La suite, par derrière la Tête du Pin, permet de découvrir un spot de bivouac bien dissimulé entre les rochers, avant de retrouver des prairies sommitales anarchiquement recouvertes d’une végétation malheureusement cadavérique en cette saison. À son extrémité, nous faisons le choix de la rapidité et basculons droit dans la pente vers le col de Lauteret. Un sentier au sud poursuit le GR® de Pays vers Glaise et la Forêt de Durbon, territoires inconnus en ce qui me concerne  ; un autre, sud-ouest, rejoint plus loin le col du Vallon de l’Aup avant de passer côté Jarjatte. En ce qui nous concerne, c’est côté Est que nous mèneront nos pas afin de récupérer, quelques lacets plus bas, notre sentier du matin, rejoindre La Cluse et mettre un terme à cette première journée d’exploration des sommets du Dévoluy. Prochain sur la liste  : le Grand Ferrand, deuxième plus haut sommet du massif, bardé d’une réputation assez redoutable, tant par sa difficulté physique que par quelques passages engagés et techniques. On en reparle dans un prochain article évidemment  !

À la descente, un joli face-à-face avec Aurouze et la Tête de la Cluse

ACCÈS AU DÉVOLUY

Spécial Mobilité Douce

Pour celles et ceux qui veulent se passer de voiture, on peut arriver déjà à Gap par une combinaison de train et de bus. Les accès se font soit depuis Marseille avec un train jusqu’à Manosque puis un autre qui assure la ligne jusqu’à Briançon (on peut ainsi venir en train depuis Briançon) ; soit depuis Aix-en-Provence TGV suivi d’un bus ; soit directement en bus depuis Marseille. On peut aussi venir depuis Grenoble en train et s’arrêter à Veynes. Horaires et tarifs sur le site des TER Sud Paca. Depuis Gap ou Veynes, il est alors possible d’utiliser une Navette Zou après l’avoir réservée, pour rejoindre le Dévoluy. Attention cette navette n’est en service qu’en saison  !

En voiture, depuis Gap

Depuis Gap, au sud, il faut suivre la direction verte Orange/Valence par la DD94. Peu avant Veynes, la D937 tourne à droite vers le Dévoluy. Possibilité, depuis la vallée du Rhône, de rejoindre Nyons (Vaucluse) puis, via les Gorges de Saint-May et Serres, de rallier Veynes – qu’on traverse direction Gap – pour prendre à gauche la fameuse D937. Après le tunnel, rouler encore quelques 2,5 km et franchir le pont sur la Béoux. Environ 500m après, prendre à gauche une petite route où rien n’est indiqué. La suivre 300m jusqu’à l’espace de stationnement qui s’ouvre à gauche de la route.

En voiture, depuis Grenoble

Depuis Grenoble, au nord, l’entrée principale sont les Gorges de la Souloise : après avoir quitté la N85 à l’entrée de Corps, la route D537 contourne le lac du Sautet au nord puis bascule plein sud par une route magnifique jusqu’à Saint-Disdier. Poursuivre jusqu’aux Étroits par la D537. À l’intersection du pont de la Souloise, monter à droite, par la D17, direction Agnières et Veynes et rouler jusqu’au col du Festre. Le dépasser, passer les Garcins et descendre jusqu’à la courte série de lacets, environ 3 km sous le col. Juste après le second lacet, prendre à droite direction La Cluse. Traverser prudemment le petit hameau. Un panneau bleu «  P  » vous invite à le quitter pour tomber peu après sur l’espace de stationnement précédemment cité.

TÊTE DE GARNESIER  : LE TOPO

Depuis le parking, emprunter la piste carrossable indiquant le col de Leuteret, de Plate Contier et le GR®. La suivre sur 850m jusqu’au pont sur l’Abéou (1). Le traverser et, immédiatement après, monter à droite par le sentier balisé du GR®. Dépasser une barrière pour le bétail et, 150m plus loin, après un lacet traversant un ruisseau, repérer à droite le sentier qui quitte le large chemin pour partir à l’assaut du sous-bois. Rejoindre un chemin plus large et Boudelle, un espace dégagé au-dessus d’une bergerie (2).

Suivre le chemin à droite et surveiller les balises du GR®, peintes au sol sur des cailloux, qui invitent un peu plus haut à s’orienter à gauche pour remonter le vallon. Monter jusqu’à l’altitude 1650 pour atteindre une intersection (3).

Prendre à droite, balisage jaune, direction Plate Contier. La trace peut ici être dégradée par le passage répété des vaches. On atteint cependant un abreuvoir (4). Il faut remonter au-dessus de celui-ci, après l’avoir dépassé, pour croiser le sentier jaune – celui qui vient du col de Lauteret – une dizaine de mètres au-dessus. Le suivre alors à droite jusqu’au col de Plate Contier (5).

Quitter les balises et le col par la droite – nord – pour remonter le talus, franchir un petit groupe de rocher et s’attaquer au versant herbeux sous la Tête des Ormans. Le sentier, étroit, infléchit à gauche pour franchir la crête au niveau d’un cairn et prendre pied sur le versant soud-ouest des Ormans. Traverser le pierrier qui s’ouvre par une trace ascendante nette et atteindre un espace aplani au niveau du Pas de l’Agneau (6).

Traverser cet espace en suivant les cairns jusqu’à la base de l’arête sud-est de la Tête de Garnesier. La remonter intégralement via un sentier/trace assez bien marqué généralement. Rester globalement quelques mètres en versant ouest en gardant toujours une distance de sécurité avec le ravin à droite. Aux abords des 2250m, une courte zone délitée doit être remontée plutôt par sa droite jusqu’à pouvoir la traverser au-dessus. Reprendre ensuite le fil de l’ascension jusqu’au sommet (7).

Descente par le même itinéraire jusqu’au col de Plate Contier. De là tirer un peu sud-est vers des résineux en contrebas. Ceux-ci atteints, arrondir sud pour contourner l’éperon rocheux au-dessus de votre tête et petit à petit arriver presque plein ouest pour se diriger vers le col de Grand Vallon (8). Plusieurs traces à bestiaux peuvent faciliter l’itinéraire, assez évident et matérialisé en traits discontinus noirs sur l’IGN.

Du col rester versant ouest et se diriger sud, en ascendance, pour dépasser les résineux et découvrir un espace plus ouvert ensuite à main gauche. Y repérer les sommets des Archers. Celui de droite est accessible à celles et ceux qui savent mettre les mains au rocher (9). Autrement continuer sur le fil de la crête et dépasser les amas rocheux derrière la Tête du Pin pour s’engager dans les espaces ouverts entourant la crête. Au moment où celle-ci bascule (10) deux possibilités  : les sangliers peuvent tirer un azimut direct à gauche dans la pente la plus raide pour rejoindre rapidement le col de Lauteret  (11) ; les autres peuvent continuer sud pour retrouver un sentier balisé au niveau du col du Vallon de l’Aup  : descendre alors à gauche pour atteindre le col de Lauteret.

Depuis le col suivre nord-est les balises du GR®94 et rejoindre ainsi l’itinéraire de montée de l’aller qu’il suffira d’emprunter en sens inverse pour rejoindre le point de départ.

La pente sommitale, juste en-dessous du sommet

RECOMMANDATIONS PARTICULIÈRES & DIFFICULTÉ

Engagement

Pas de difficulté notable jusqu’à Plate Contier. On reste jusqu’à ce point sur un itinéraire de moyenne montagne bien tracé et bien balisé. La partie qui conduit jusqu’au sommet de la Tête de Garnesier n’est en revanche plus balisée mais reste cependant cairnée. L’itinéraire à suivre demeure dans tous les cas évident et toujours lisible, faisant de cette proposition d’ascension un bon client pour celles et ceux qui veulent s’initier au terrain d’aventure. L’omniprésence du vide n’est de surcroît pas rédhibitoire pour les sujets au vertige. On peut rester bien protégé sur le versant ouest sans avoir à côtoyer les ravins de manière trop insistante. Encore un bon point.

Niveau physique

La principale difficulté pourra être l’effort physique nécessaire pour venir à bout des quelques 1100 mètres de dénivelé jusqu’au sommet. Les toutes dernières pentes sont soutenues  ! Il faudra donc ne pas tout avoir donné jusqu’à Plate Contier pour profiter de l’ascension. Une course pour apprendre à en garder sous la semelle donc  ! Ma proposition de courte variante pour le retour n’est pas excessivement complexe à trouver mais si vous n’avez aucune expérience de la navigation hors-sentier, ne la tentez pas forcément.

Eau

Un point sur l’eau  : je vous ai parlé d’un abreuvoir sur le chemin. L’eau y coule en effet depuis une source captée mais l’endroit est fréquenté par les vaches et n’a rien de ragoûtant selon le moment de la saison.

L’un des fréquents points de vue sur l’arête, accessible avec prudence à qui ne craint pas le vide !

TÊTE DE GARNESIER  : AVIS PERSO

Je vous  fais une synthèse de mon avis général sur cet itinéraire. Garnesier, sachez-le, a toujours été pour moi synonyme de rêve éveillé. La faute aux Dolomites que me rappellent leurs silhouettes – à la Tête et surtout au Roc – et à la première image que j’ai eu de ces deux cimes en passant devant La Jarjatte sur la route de la Croix-Haute au début des années 2000. Je tourne la tête et là j’imprime deux formidables pointes, séparées par un col en forme de selle bien marqué, qui semblent interdire le passage de ce côté. Un choc visuel je vous assure. Des années après je découvre le Dévoluy et comprend que ces deux là en font partie. Depuis ça frise l’obsession.

Ambiance & décor

L’opportunité de faire deux fois dans la même année l’ascension vers la Tête de Garnesier – le plus facile des deux sommets – a donc répondu à donner vie à un vieux rêve. Ce que j’en retiens c’est aujourd’hui une ambiance, un flirt permanent avec le vide de sa face Est rempli par les masses de Bure, du Roc de Garnesier et du mur de la Rama. Et pas n’importe quel vide car celui-ci est un trésor géologique à ciel ouvert. Visuellement c’est époustouflant. La Tête de Garnesier vaut essentiellement pour cette seconde partie, quand bien même sa première, bucolique, demeure très agréable mais cependant moins immersive que la montée au col des Aiguilles ou au Charnier. Mais bon sang, cette section entre Pas de l’Agneau et sommet, c’est de l’or en barre. Selon la lumière que vous avez ou le moment de la journée où vous vous y trouvez, il y a de quoi se rendre dingue.

Garnesier

Une imagerie de montagne qui confine parfois au fantastique

Isolement

Autre point non négligeable  : l’isolement du secteur. Bon déjà le Dévoluy n’est habituellement pas le Mont-Blanc. Mais là c’est encore moins fréquenté que le reste du massif, c’est peu dire  ! Il y a donc cette satisfaction d’emprunter des chemins différents, d’assouvir une curiosité, de ne pas suivre le courant global. Et Garnesier n’est pas une exception dans le Dévoluy où sortir des sentiers – déjà très peu – battus ouvre les portes d’une autre dimension de la randonnée.

Garnesier

Sensations solitaires comme ici au niveau du Pas de l’Agneau

TÊTE DE GARNESIER  : HÉBERGEMENT ASSOCIÉ

Le Gîte de l’Yvraie (testé et approuvé)

Au départ de La Cluse, une seule adresse possible  : le Gîte de l’Yvraie. Une bâtisse du 19ème siècle restaurée, une belle salle voûtée dans une ancienne bergerie pour les repas, 4 chambres pour une capacité de 18 couchages. Et un accueil chaleureux des propriétaires, amoureux de montagne et du Dévoluy plus particulièrement. J’y ai fait étape en 2020, à la veille de ma première tournée de reportages dans le Dévoluy et j’en garde un très bon souvenir. La nuit est à partir de 23 euros/personne et la demi-pension à 48 euros/personne. À table, c’est du fait maison avec des produits frais et qui privilégient, si possible, une agriculture raisonnée, écologique et locale. Convaincant, non ? Contact : 04. 92.23.87.18 ou mail : contact@gite-de-lyvraie.com

AUTRES ITINÉRAIRES AU DÉPART DE LA CLUSE

Le Vallon de la Cluse

AUTRES ITINÉRAIRES DANS LE DÉVOLUY

Col des Aiguilles

Le circuit du Puits des Bans

Les Vallons de Bure

Garnesier

Si proche, si loin : le Roc de Garnesier fascine

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4 Comments

  1. dani 13 / Daniel Thévénin Répondre

    Quel itinéraire fantastique mais encore accessible pour de bons marcheurs, c’est ce que je retiens sauf erreur de ma part! Les Garnesier ( qui se remarquent de loin ) ont un pouvoir magnétique surprenant, c’est l’impression que j’ai gardée en hiver depuis le haut de la piste de ski du Sommarel au pied du plateau de Bure (Superdévoluy).

    1. carnetsderando Auteur de l'article Répondre

      Hello Daniel,

      Oui c’est bien ce que je pense. C’est une bonne base de départ pour se lancer dans des itinéraires sportifs qui commencent à sortir des sentiers battus. Et quelle récompense au sommet !

    1. carnetsderando Auteur de l'article Répondre

      Merci Nicolas ! J’essaie d’être exhaustif ! Certains me le reprochent parfois qui aiment aller à l’essentiel et ne pas passer des plombes à lire un article. Mais je sais que d’autres apprécient cette immersion recherchée par le texte dans le lieu. En tout cas, pour ma part, je me fais toujours plaisir à écrire alors c’est toujours plaisant de lire que ce travail est récompensé par des avis favorables. Au plaisir de te lire sur d’autres reportages !

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