Les Chemins de la Contrebande franco-suisse : le Colporteur

Nouvel itinéraire, nouveau jeu, nouveau territoire. Après avoir endossé les habits d’un Orlogeur, c’est maintenant dans la peau d’un Colporteur que je me glisse. Une occasion fournie par ce second parcours des Chemins de la Contrebande qui invite le randonneur à marcher trois jours, de la Suisse à la France, au départ de Saint-Ursanne, en partant à la découverte de ce métier ancestral qui dissimulait parfois un peu de contrebande de marchandises, mais aussi d’idées. De nouvelles énigmes, de nouvelles missions : c’est reparti sur les Chemins de la Contrebande franco-suisse !

Difficulté : moyenne | Longueur : 45 km | Durée : 3 jours | Dénivelé : 1250m

Rencontre avec un vrai-faux douanier sympa à la Cabane de Chamesol

Rencontre avec un vrai-faux douanier sympa à la Cabane de Chamesol

[dropcap]F[/dropcap]in de la partie de cache-cache entre la France et la Suisse. Ce nouveau jeu se déroule intégralement chez le voisin et s’élance de Saint-Ursanne. Me voici cette fois dans la peau d’un colporteur, ces vendeurs ambulants d’un autre temps qui parcouraient la campagne, de village en village, pour faire le commerce de diverses marchandises de première nécessité. Je dois dissimuler des pièces de contrebande dans ma marmotte, ce grand sac compartimenté que les colporteurs portaient sur le dos, afin de les échanger en France, à l’arrivée. Il faudra au passage déjouer les pièges de la douane et prouver mon innocence dans une sombre histoire de contrebande d’idée dans laquelle je me retrouve plongé. Autant le dire : il y a du pain sur la planche ! Magnifique village bâti sur les rives du Doubs, Saint-Ursanne se feuillette comme un beau livre d’histoire où chaque monument donne lieu à un nouveau chapitre. Le jeu me donne l’occasion de le découvrir en profondeur tandis que je traque les réponses aux questions posées par le livret. Ma quête s’achève à l’ermitage où repose une représentation paresseuse de celui qui a laissé son nom au village. Ma marmotte est pleine à craquer : je peux désormais démarrer mon périple jusqu’à Saint-Hyppolite.

Cette idée balbutiante d’aller au-delà de la seule marche ouvre des portes de créativité illimitée pour (re)découvrir chacun de nos territoires. En m’amusant sur les sentiers, à découvrir ce qui était hier le terrain d’un jeu grandeur nature de chat et de la souris pour les douaniers et les contrebandiers, je me dis que ces chemins ouvrent réellement la voie à une tendance qui n’en est qu’à ses balbutiements

Je m’échappe de Saint-Ursanne, transformé en éponge humaine à cause d’un soleil implacable. La chaleur reflue du sol en vagues chaudes et épaisses. La moindre parcelle d’ombre offerte permet d’échapper, l’espace de quelques secondes, à la cuisante morsure du ciel. La Suisse connaît, paraît-il, l’un de ses étés les plus chauds. L’idée de plonger tête la première dans le Doubs me taraude. Je sens des gouttes épaisses perler dans mes cheveux et glisser lourdement le long de mes tempes, de mon cou, de mes épaules. Je traverse en ahanant un pré à découvert pour me réfugier sous le couvert des arbres. Si l’ombre m’offre désormais un bouclier protecteur, la pente, en revanche, s’infléchit pour hisser le sentier jusqu’au col de la Croix. Le fond de l’air, chauffé à blanc par une canicule estivale qui frise l’insupportable, est à la limite de l’asphyxie. L’itinéraire surgit à presque 800 mètres d’altitude dans un paysage d’alpages d’altitude où souffle péniblement un vent dispensant une maigre fraîcheur. J’avale les dernières gouttes d’une eau passée de tiède à chaude et prends la direction de Seleute par un chemin mêlant routes désertes et traversées de prairies.

Carré Colporteur

[dropcap]D[/dropcap]e Seleute, une longue traversée sur les hauteurs de cette partie du Parc du Doubs Suisse attend le marcheur. Une échappée vers l’ouest permet alors de rejoindre la frontière française aux abords de Chamesol. C’est là, dans ces vastes forêts que les colporteurs d’hier jouaient leur va-tout pour échapper aux patrouilles de douaniers qui surveillaient cette ligne invisible entre la France et la Suisse. Je progresse donc dans ce qui était hier le terrain d’un jeu grandeur nature de chat et de la souris pour les douaniers et les contrebandiers. J’en tiens pour preuve cette relique restaurée d’une cabane de douaniers, rencontrée peu avant l’arrivée à Chamesol. J’y croise monsieur Morel, le maire de la commune et lui-même ancien douanier. Le temps d’un échange animé, son discours enthousiaste et vivant fait revivre dans mon esprit les grandes heures de cette époque pas si lointaine. Avec son assentiment, je poursuis ma route vers Montéchéroux, petit village poussé au milieu de champs ondulants couronnés de lignes boisées.

Le bitume s’abandonne au niveau d’un carrefour à ciel ouvert, remplacé par un chemin herbeux dessiné au-delà d’un portique. Hautes herbes et fleurs en pagaille y font peu à peu irruption tandis que les arbres s’enroulent progressivement au-dessus des épaules du marcheur jusqu’à finir par le cerner de toutes parts

Je trouve refuge au Musée de la Pince de Montéchéroux. Les musées constituent autant de visite pour aller plus loin dans la compréhension de la thématique et du secteur explorés. J’y fais donc un crochet avant d’exploiter le nouveau totem qui va me permettre d’avancer dans la résolution des énigmes du jeu du Colporteur. Au-delà de Montéchéroux, le bandeau de la route cède peu à peu la place à des chemins forestiers. En quelques minutes, la forêt reprend ses droits, haute, ombragée et remplie du chant d’oiseaux invisibles. Cette partie de l’itinéraire est magnifique et réserve de belles vues sur Saint-Hippolyte et sa vallée, terminus de l’aventure. A la faveur d’un passage plus accidenté, qui serpente habilement dans les replis les plus praticables de la falaise, l’immense arche rocheuse de la Grotte du Bisontin surgit, sans hésitation le clou de cette dernière étape du Colporteur. La descente s’achève plus tard dans les faubourgs de Saint-Hippolyte, bourgade intimiste à la jonction du Doubs et du Dessoubre, toute de ponts et de ruelles traversières, au sein desquelles se découvrent des cours secrètes et où s’envolent des escaliers de bois. Un joli terminus pour cette randonné ludique et créative, porteuse d’un concept résolument pionnier.

Chemins de la Contrebande Colporteur Bisontin

La grotte du Bisontin, ultime découverte sur le parcours du Colporteur

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– INFOS PRATIQUES –

Carte : IGN 1/25000 3623 OT Gorges du Doubs & Swiss Topo 222 Clos du Doubs
Accès : en voiture, depuis Paris, A6 jusqu’à Beaune, puis A31 direction Dijon et enfin A36, direction Besançon, puis Montbéliard. Depuis le sud ou l’ouest, A7 ou A89 direction Lyon. De Lyon, A42 direction Genève puis A39 et A36 direction Besançon, puis Montbéliard. A Montbéliard, prendre la sortie 7 après le pont sur le Doubs. Au rond-point, tourner à droite et franchir à nouveau le Doubs. Au rond-point suivant le pont, prendre à gauche, par D126. Suivre le Doubs et, au 2ème pont, tourner à gauche. A l’intersection suivante, prendre à gauche par l’Avenue de la Révolution de 1789 puis sortir 400m plus loin à droite, par rue de Seloncourt, direction Seloncourt. Suivre cette D34 tout droit, en traversant ensuite Hérimoncourt, puis Abbévilers. Passer la frontière suisse et poursuivre tout droit jusqu’à Porrentruy. Là suivre la direction Delémont par route 6. Rouler environ 14 km et tourner à droite, par route 249, direction Saint-Ursanne.
Topo : les 45 kilomètres de cet itinéraire pédestre vous mèneront de Saint-Ursanne (en Suisse) à Saint-Hippolyte (en France). Composé de 3 étapes, le parcours permet de découvrir plusieurs sites touristiques remarquables parmi lesquels la Vallée d’Or, mais aussi de se familiariser avec l’histoire de la contrebande franco-suisse. L’intégralité de l’itinéraire est disponible sur le site web des Chemins de la Contrebande, étape par étape. Il est également possible d’en télécharger la trace GPS.
Notes : pour profiter pleinement de l’itinéraire et du jeu qui y est associé, je vous recommande vivement de vous procurer le carnet de route qui vous accompagnera tout au long du parcours (disponible également en téléchargement). Le parcours invite à la découverte d’un maximum de sites et de musées. Leur visite n’est pas obligatoire et vous pouvez vous contenter de simplement marcher, sans chercher à résoudre l’énigme. Ce serait faire peu d’honneur à la qualité de l’itinéraire et aux efforts de ses créateurs. Ce serait aussi, et surtout à mon sens, passer à côté d’une lecture du territoire 100% originale et ludique. J’ai réalisé ce parcours au cours de l’été. Il y a fait assez chaud ! N’oubliez pas de prendre de l’eau en conséquence, ainsi que des lunettes, un chapeau et de la crème solaire ! Pour vous aider dans votre quête, une application mobile est disponible. Plutôt utile au cas où vous auriez besoin de vous géolocaliser, les extraits de carte sur le carnet de route étant un peu limite ! Pour le retour, vous pouvez revenir en taxi ou en bus (voir la rubrique « transports » sur la fiche de l’itinéraire disponible sur le site des Chemins de la Contrebande).
Les hébergements : l’itinéraire a été conçu de manière à offrir un hébergement à chaque fin d’étape. Ceux-ci sont détaillés sur la page de présentation de l’itinéraire du Colporteur, dans la partie « détail des étapes ». Il est conseillé de réserver en avance et de prendre connaissance des recommandations sur le site liées à certaines contraintes horaires.
Liens utiles : pour découvrir le territoire en amont de votre venue, rien de tel qu’une visite sur le site web du Pays Horloger. Côté suisse, c’est du côté du site du Parc Naturel du Doubs que ça va se passer. Pour rentrer dans le détail des Chemins de la Contrebande, rendez-vous évidemment sur le site officiel de ces itinéraires.

EN BREF

Toujours aussi sympa de marcher sur ces Chemins de la Contrebande qui invitent à une manière de randonner différente. On y retrouve les totems et les énigmes (faciles) à résoudre. On se prend au jeu en reliant entre eux des lieux vraiment dignes d’intérêt. Petit reproche : des sections de bitume un peu trop présentes le dernier jour. Dommage de ne pas davantage exploiter les sentiers !

 

by-nc-ndCe reportage Carnets de Rando, sous licence Creative Commons, est la propriété exclusive de Carnets de Rando. Son usage à des fins non commerciales est autorisé à condition de mentionner son appartenance au site www.carnetsderando.net. Pour toute autre utilisation, merci de me contacter.

One Comment

  1. RIGAULT Répondre

    Merci de nous avoir conduits avec autant de poésie dans ce petit paradis… Difficile d’imaginer un instant le narrateur/randonneur dans la peau d’un colporteur, même si c’est la curiosité qui l’a mené initialement à s’immiscer dans un territoire quelque peu tenu secret et à piétiner sur les pas des contrebandiers en toute impunité…

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