Dévoluy : 5 sommets essentiels qui vont vous rendre complètement fous de ce massif

Retour dans le Dévoluy. Petit massif mais gros potentiel. Cette fois je délaisse l’intérieur pour regarder plus haut, vers ces sommets alignés de part et d’autre, certains à l’allure accueillante, d’autres nettement moins. J’ai choisi de vous en présenter cinq. Aucun n’est vraiment facile mais tous donnent un aperçu différent du massif depuis leur sommet. Bienvenue dans le Dévoluy de l’altitude, excitant et exigeant, unique et fantastique. Les promesses d’ascensions soutenues, parfois engagées, dans des décors convoquant l’imagerie des Dolomites Italiennes seront tenues. Aucun de ces sommets ne vous décevra, vous avez ma parole. Certains sont fameux, d’autres moins. Un équilibre de force et de notoriété pour ne rien manquer ni de l’essentiel, ni de pépites en devenir. Un Dévoluy pour costaud(e)s qui aiment en découdre avec des montagnes au caractère affirmé.

AVANT-PROPOS : À QUI S’ADRESSE CET ARTICLE ?

Rappelez-vous, il y a déjà quelques temps de ça, j’avais déjà présenté sur Carnets de Rando une sélection d’itinéraires pour faire ses Premiers Pas de Randonneur dans le Dévoluy. L’article était essentiellement destiné aux marcheurs/ses débutant(e)s à intermédiaire, ainsi qu’aux familles, avec une volonté de présenter un visage du territoire accessible à tous. Mais quid des montagnards proprement dit, celles/ceux qui veulent en découdre avec du dénivelé et conquérir au passage quelques sommets ? Eh bien qu’ils se réjouissent car c’est à eux que se destine ce nouvel article !

Le Dévoluy : un territoire de montagne qui s’adresse aussi aux braves et une magistrale leçon d’humilité

Parce que, n’en doutez pas, ces sommets du Dévoluy ne sont pas à la portée de tous. Le terrain, l’itinéraire, la présence parfois de passages techniques ou aériens, la longueur et le dénivelé : autant de facteurs qui nécessitent de l’expérience et de solides capacités physiques. Rien ne pointe au-dessus de 2800 mètres pourtant mais, comme dirait Maître Yoda à Luke sur Dagobah : est-ce à la taille que tu dois me juger ? La réponse vous la connaissez et c’est un non choral ! Aussi, si vous pensez avoir le profil d’un Jedi dévoluard en devenir, poursuivez votre lecture et découvrez ces 5 sommets qu’il faut absolument gravir dans le Dévoluy !

Dans les derniers mètres de la folle ascension du Grand Ferrand

PROPOSITION D’ASCENSIONS

1 – LA TÊTE DE GARNESIER (2367m)

On ne voit qu’elle quand on arrive dans le Dévoluy par le sud et la route du col du Festre. Un coup d’œil à gauche, à l’approche de La Cluse et elle est là, dépassant d’une tête les reliefs plus modestes du secteur, face au Roc avec lequel elle partage son nom. Sur le chemin de ronde du massif, la Tête de Garnesier est la sentinelle sud-ouest, celle qui garde un œil sur le Buëch et défend l’accès depuis la Jarjatte.

Isolement du lieu, solitude du marcheur. Si ce n’est quelques têtes de bétail, la Tête de Garnesier semble mise au ban de toute activité humaine. Le rêve absolu pour qui cherche à justement en décrocher !

J’ai eu la chance de pouvoir la gravir deux fois, à deux saisons différentes, printemps et automne. Chaque fois ce qui m’a frappé c’est de ne croiser absolument personne en chemin. Une aubaine qui renforce la connivence avec le massif. Lorsqu’il est constellé de fleurs, avant l’arrivée des troupeaux, le vallon conduisant aux cols de Lauteret et de Plate Contier est un micro-paradis alpin qui bourdonne de vie et de couleurs.

La suite, sous la Tête des Ormans et en direction du Pas de l’Agneau affiche un visage déjà plus minéral dans lequel s’exprime toute l’âpre beauté du Dévoluy : ravins insondables, élans artistiques de la géologie, ligne de crête magique… L’envolée vers le petit cône sommital de la Tête de Garnesier, outre l’effort qu’elle requiert, est riche de l’émotion des beaux et grands itinéraires alpins. Quand les nuages sont de la partie et viennent lécher le pied des montagnes au gré d’un ressac brumeux, le petit massif haut-alpin prend des allures de sanctuaire Asgardien.

La crête reliant le Pas de l’Agneau au sommet compte assurément parmi les très beaux passages alpins du Dévoluy.

Depuis le sommet c’est toute la ligne du Vercors qui se déploie au-delà du Jocou. À vos pieds s’ouvre un abîme duquel émerge la silhouette fascinante du Roc de Garnesier, sommet à l’accès autrement plus délicat. Une ogive massive, tétanisante de puissance muette et de menace, derrière laquelle le rempart prolongeant le Haut-Bouffet se déplie vers l’Est. Juste derrière, invisible, se tient le Col des Aiguilles, surmonté par les Aiguilles de La Rama et, plus loin encore, le Grand Ferrand. Pour varier les plaisirs, le retour pourra s’envisager par les Archers et le col de Lauteret, secteurs très peu visités dissimulant pourtant un cheminement qui mérite le détour.

Tête de Garnesier – Infos Pratiques

Départ/Arrivée : La Cluse

Difficulté : difficile | Distance : 15 km | Dénivelé : 1215 mètres | Durée : 6h50 | Carte : IGN TOP 25 1/25000è 3337 OT – Dévoluy, Obiou, Pic de Bure

Recommandations particulières & Topo : alors il faut savoir que j’ai déjà consacré un article complet rien qu’à la Tête de Garnesier sur Carnets de Rando : Garnesier, le sommet à qui il faut faire la Tête. Histoire d’éviter les répétitions ici je vous invite à en consulter le guide pratique situé juste après le récit. Pour résumer : endurance requise a minima rapport au dénivelé conséquent, engagement limité mais vigilance nécessaire sur l’arête.

Hébergement : au départ de La Cluse, une seule adresse possible : le Gîte de l’Yvraie. Une bâtisse du 19ème siècle restaurée, une belle salle voûtée dans une ancienne bergerie pour les repas, 4 chambres pour une capacité de 18 couchages. Et un accueil chaleureux des propriétaires, amoureux de montagne et du Dévoluy plus particulièrement. J’y ai fait étape en 2020, à la veille de ma première tournée de reportages dans le Dévoluy et j’en garde un très bon souvenir. La nuit est à partir de 23 euros/personne et la demi-pension à 48 euros/personne. À table, c’est du fait maison avec des produits frais et qui privilégient, si possible, une agriculture raisonnée, écologique et locale. Convaincant, non ? Infos et réservation : 04 92 23 87 18 ou mail : contact@gite-de-lyvraie.com

2 – LE GRAND FERRAND (2758m)

Avec le Grand Ferrand on commence à taper dans le client sacrément sérieux. Sur la deuxième place du podium des plus hauts sommets du Dévoluy, le Ferrand est aussi un défi physique et, dans une certaine mesure, technique. Ne comptez pas débarquer au sommet sans avoir sorti les mains des poches. Le Grand Ferrand est une entreprise de longue haleine qui nécessite de solides ressources et un minimum d’engagement de la part des candidat(e)s à son sommet.

Le Grand Ferrand est une ascension qu’il est indispensable de prendre au sérieux. Sous peine d’y laisser quelques plumes, voire davantage encore.

Une première partie, en forme d’échauffement, permet depuis le départ de Lachaup de patiemment remonter le long et sauvage Vallon de Charnier jusqu’au col du même nom. Un parcours dont je vous avais déjà parlé il y a un bon moment en mode hivernal pour rallier le sommet de la Tête de Lauzon. Dans l’ombre de la spectaculaire Roche Courbe, la traversée du Charnier fait jeu égal avec celle des Aiguille en terme d’ambiances. Progressive et délicieusement immersive, ce long premier segment permet de jeter un œil vers la Jarjatte une fois le col rejoint.

C’est à partir de là que les choses sérieuses commencent. Première étape : contourner patiemment la base de la Tête de Vallon Pierra pour viser le pli du Vallon Froid, semblant d’épaule s’affaissant sous la raide pente sud du Grand Ferrand. Une ascension au courage dans les pentes nues cuisant sous le soleil du sud des Alpes. La sente devient précaire, l’instinct de la trajectoire la moins fatigante vite requis. Plus question de galoper dans ces versants raides tapissés de caillasses brisées. Il faut ensuite viser des gradins aux allures d’escalier, les seuls capables de franchir cette ceinture de falaises et d’à-pics défendant l’avant-dernier segment du Ferrand.

De loin, l’assaut contre ce sommet sans corde paraît hautement improbable. Sur place, pourtant, un passage logique se dévoile, toujours raide sans être en permanence exposé.

Mettre les mains devient pratique courante à l’approche des sections finales qui tutoient plus ouvertement le vide. Le Dévoluy met le randonneur face à ses limites en l’écrasant dans un univers d’altitude d’austérité, de solitude et de verticalité. Le souvenir des Dolomites m’effleure évidemment. Puis la pente se couche et l’exaltation couve. Surgir au sommet du Ferrand c’est phénoménal, d’une intensité rare. Un must d’absolu qui ne s’improvise cependant pas pour garantir l’entrée triomphante de ce souvenir au rayon de vos plus forts souvenirs de montagne.

Grand Ferrand – Infos Pratiques

Départ/Arrivée : Lachaup

Difficulté : très difficile | Distance : 18 km | Durée : 7h30 | Dénivelé : 1465m | Carte : IGN TOP 25 1/25000è 3337 OT – Dévoluy, Obiou, Pic de Bure

Recommandations : pour être agréable, l’expérience du Grand Ferrand exige une « caisse » solide et de l’aisance non feinte sur du rocher avec de l’ambiance. N’y partez pas en vous disant « on verra bien si je passe » car le retour de bâton pourra être au mieux, juste sévère, au pire, très grave. Ne grillez pas toute l’énergie à la montée : le retour est long, très long même et il vaut mieux en avoir encore sous la pédale quand on quitte le sommet. Prenez si possible un casque avec vous car, s’il y a du monde, les caillasses peuvent pas mal pleuvoir depuis le dessus. Les passages techniques – non équipés mais c’est de la grimpe facile de niveau II à timidement III – ne sont pas vraiment durs mais il y règne une ambiance qui pourra impressionner celles/ceux qui ne sont copains ni avec la pente, ni avec le gaz. Ne progressez vers le haut que si vous estimez être ensuite capable de redescendre ce que vous aurez monté.

Topo : depuis Lachaup suivre la direction Serre Long et rejoindre le poteau signalétique associé (1). Prendre à gauche la direction Col de Charnier balisée rouge et blanc GR®93. On passe sous la cabane du Chourum Clot (2) pour s’élever ensuite en arrondissant vers le pied de Roche Courbe (3). Suivre les balises qui basculent dans le Vallon de Charnier en passant sous le versant nord de Roche Courbe. Rejoindre le fond du vallon et le remonter jusqu’au col de Charnier (4). De là repartir nord-est par une sente non balisée qui va contourner la Tête de Vallon Pierra. Atteindre un premier replat, à l’aplomb du versant sud du Grand Ferrand (5). Monter, au mieux, à gauche d’un petit rognon bordé d’un thalweg pour atteindre un second replat (6). Viser alors la trace ascendante qui, tracée en diagonale dans le pierrier, rejoint le pied d’un passage « cheminée » qui dessert la suite de l’itinéraire d’ascension (7). La gravir en suivant des marques rouges pour enchaîner dans l’axe par un versant de petites strates faisant office d’escalier. On finit par rejoindre une sorte d’arête redressée qu’on passe par franchissement de petits ressauts de grimpe avec, par endroit, un peu d’exposition (8). La pente se couche dès que les derniers mètres sont là. Suivre alors une sente bien marquée pour rejoindre le sommet (9).

Hébergement : à Lachaup vous pourrez reposer vos pieds fourbus au Gîte d’étape du Rocher Rond. Le gîte est tenu par Martinho, figure connue du Dévoluy et accompagnateur en montagne de son état. Un bon interlocuteur, donc, pour causer montagne avant ou après une journée d’ascension ici. Le gîte dispose de 29 couchages répartis en chambres de deux ou en dortoir. La demi-pension avec hébergement, literie, dîner et petit déjeuner est à partir de 56 euros. Infos et réservation : 04 92 58 85 63 ou mail martinho.rodrigues@orange.fr

3 – LE PIC PIERROUX (2377m)

Le Pierroux c’est un peu l’outsider de la sélection. Toujours dans l’idée d’un chemin de ronde circulant autour du massif, il est au Champsaur et Valgaudemar ce que Garnesier est au Büech. À l’extrémité nord-est du Dévoluy, point final de la longue ligne de Faraud avant de s’effondrer vers le Pas de l’Arche, le Pic Pierroux joue les timides. Il ne fait pas partie de ces sommets qu’on repère instantanément en balayant l’intérieur du massif du regard. J’espère donc vous donner en quelques lignes des raisons concrètes d’en tenter l’ascension.

Discret, quasiment anonyme, le Pierroux semble vouloir se faire oublier. La vue depuis son sommet est pourtant et tout bonnement juste extraordinaire.

Le départ, concédons-le, n’a rien de très folichon depuis les Hauts Gicons, banal chemin carrossable desservant la bergerie de la Cabane de l’Aup. La suite immédiate, en revanche, est d’un tout autre niveau. Accès pédestre le plus septentrional du massif, le col de l’Aup offre des points de vue saisissants sur le Lac du Sautet en contrebas. D’autant plus spectaculaire que la sente s’invite sans trembler au bord des falaises au-dessus desquelles des corniches herbeuses avancent avec témérité. Un cheminement de rêve, pour peu que le vide ne vous impressionne pas ! Le Pic Grillon, fusée de roche grise aux parois lisses, achève de faire de l’endroit le décor d’un film d’aventure épique. Irréel et fantasque !

La suite congédie le rêve pour laisser la place à l’effort. Le sommet du Pierroux, quelques 300m plus hauts, n’est desservi par rien d’autre qu’une pente au dénivelé franc et dénuée de tout lacet. La trajectoire sera uniquement définie par la forme physique du moment du/de la marcheur/se. L’exercice est long et exigeant, donnant parfois la sensation pénible de faire du sur-place. S’affranchir de toute réflexion et s’en remettre à la force brute le raccourcira évidemment. Mais, tenez vous le pour dit, le spectacle au sommet en vaut absolument la peine !

Derrière ses allures de John Doe, le Pierroux oppose une résistance qui ne lassera pas de surprendre celui ou celle qui l’aurait pris pour une montagne à vaches !

De dernières et belles chevauchées rocheuses, un soupçon aériennes, permettent de profiter de l’alignement incroyable de la barrière de Faraud, qui dresse un chapelet de pointes au-dessus de la vallée du Drac et de la Route Napoléon. Pile en face, c’est l’ouverture de l’étroite vallée du Valgaudemar couronnée de sommets prestigieux comme l’Olan. La visibilité est telle qu’on aperçoit même la Meije et, plus proche, la Roche de la Muzelle. Répondent également présent le Taillefer, le Vercors et, bien évidemment, le socle imposant du Plateau de Bure. Le Pierroux, croyez-moi, c’est le joker à posséder dans votre manche !

Pic Pierroux – Infos Pratiques

Départ / Arrivée : les Hauts Gicons

Difficulté : difficile | Distance : 14 km | Durée : 5h45 | Dénivelé : 1100m | Carte : IGN TOP 25 1/25000è 3337 OT – Dévoluy, Obiou, Pic de Bure

Recommandations : ce doit être la moins technique et exposée des ascensions présentées dans cette sélection. La progression se fait tout le temps sur du bon terrain herbeux rassurant. Le seul hic, c’est la pente ! Les 300 derniers mètres sont copieux et seulement les plus courageux/ses oseront attaquer le versant frontalement. Mollets d’acier obligatoires pour assumer ce choix. Attention également au passage de la Cabane de l’Aup si les brebis sont là. Ça leur arrive d’être au milieu du chemin et les patous veillent au grain. Des ajustements et contournements seront peut-être nécessaires pour éviter que les chiens gueulent et, surtout, pour éviter de couper le troupeau ! Une dernière recommandation sur la partie qui longe les falaises après le col de l’Aup : gardez quand même vos distances, surtout un jour de vent et sans parachute !

Topo : depuis le parking après les Hauts Gicons (antenne relais) suivre la piste du GR®93 blanc et rouge. À l’intersection – point coté 1359 sur l’IGN (1) – poursuivre à gauche la piste en ascendance. Peu avant son terminus (2), la quitter à gauche par un sentier qui rejoint la cabane de l’Aup (3) (attention aux chiens). La dépasser et rejoindre le col de l’Aup (4). Depuis le col partir à droite – est, nord-est – pour suivre le fil du versant. Pas forcément nécessaire de gravir/descendre les pointes en triangle qui jalonnent ce tracé : couper à leur base pour garder un cap. Une petite désescalade est requise à un moment pour franchir une modeste strate (5) et poursuivre vers l’arrondi de la crête nord-ouest du Pierroux (6). La remonter dans l’axe, davantage côté nord que sud, jusqu’au sommet (7).

Hébergement : alors là, aucune hésitation, ça se passe obligatoirement au Gîte d’étape de Saint-Disdier chez Sylvie ! Un accueil rando comme on les aime, une atmosphère conviviale et un p’tit gîte tout douillet pour dormir avant ou après l’aventure. Côté restauration, c’est que du produit local, frais et autant que faire se peut, bio. Tout est fait maison et, comment dire, ça se sent ! La nuitée et le petit-déjeuner sont proposés à 28 euros. En demi-pension, ça monte à 44 euros. Autant dire que le budget est maîtrisé eut égard au rapport qualité/prix proposé au gîte. Sylvie prépare aussi des paniers pique-nique à 11 euros. Infos et réservation : 06 60 69 80 85 ou gites-st-disdier@wanadoo.fr

4 – GRANDE TÊTE DE L’OBIOU (2789m)

Avec le Grand Ferrand c’est le big boss du Dévoluy. Et, surtout, à 2789 mètres d’altitude, c’est lui qui rafle la première place du podium. Quand on vient du Trièves, l’Obiou en impose sacrément. Pas le genre de sommet qui prête à plaisanter. Côté nord c’est une flèche fusiforme et sans faiblesse apparente qui semble avoir été extraite des Dolomites pour atterrir ici, entre Isère et Hautes-Alpes. Plusieurs itinéraires – dont certains 100% escalade en terrain d’aventure engagé – permettent de le gravir mais aucun ne peut-être qualifié de facile. Pour cette sélection, c’est de sa voie normale dont il sera question.

L’Obiou veille avec aplomb sur le Trièves au-dessus duquel il déploie sa redoutable silhouette. Un sommet hypnotisant parmi les plus beaux du Dévoluy

Avec son casque sommital si particulier, l’Obiou reste à la vue des marcheurs sur toute sa première partie. Pour mieux les impressionner, voire les décourager ! Les vallons bosselés qui prolongent la combe du Petit Obiou et qu’il faut progressivement remonter sont la section la plus accueillante de l’aventure. Le reste, une fois la pile de cailloux dégringolant sous les à-pics de la face est atteinte, n’est qu’une affaire de mollets et d’engagement. L’Obiou avale ses visiteurs dans l’amphithéâtre minéral de ses fameux escaliers dévoluards, passage clé de l’ascension qui fascine-exalte-terrifie (rayer la mention inutile). Toute l’identité de l’itinéraire est contenue dans cet instant mémorable, plus facile à la montée qu’à la descente, sachez-le.

Le col entre le Petit Obiou et la Grande Tête est rejoint, au-delà duquel se révèle un paysage fantasque de roche souveraine. La masse des Agards émerge d’une zone de vallons parmi les plus difficilement accessibles du massif. Derrière c’est le Nid et la Tête de Lapras, sommets très peu souvent visités – du moins médiatisés ! La suite, sur le flanc sud du sommet de l’Obiou, continue d’assurer le spectacle. Un itinéraire accidenté qui teste parfois les limites de chacun(e) à l’instar du final du Grand Ferrand, jusqu’à ouvrir la porte de son sommet à celles/ceux qui auront tout donné pour le mériter.

L’empreinte du Dévoluy, celle qui estomaque et fait écarquiller les yeux, elle est ici, dans ces visions de caillasses austères et sublimes à la fois. L’Obiou semble avoir été taillé par et pour des dieux.

Rupture de pente et ravines vertigineuses accueillent les challengers curieux de mesurer la sidérante hauteur de la marche. L’arrondi de l’arête du Rattier qui raccorde celle du Malpasset enflamme mon imaginaire. C’est une autre voie d’accès possible, longue et salement engagée selon la rumeur. Je romps le contact visuel avec l’abîme, levant les yeux vers le Vercors, le Taillefer et les Écrins. Comme le Ferrand encore une fois, réussir l’Obiou libère une vague de plaisir sur laquelle surfer à l’infini. C’est un monstre sacré du Dévoluy, peut-être l’un de ses plus beaux sommets. À faire sans hésitation mais avec beaucoup d’humilité.

Grande Tête de l’Obiou – Infos Pratiques

Départ/Arrivée : parking sous le col des Faïsses

Accès : l’Obiou a ceci de particulier que, à moins de vouloir démarrer de tout en bas – sacrée mission ! – le mieux est d’approcher le col des Faïsses en empruntant la (longue) piste qui s’élève après les Payas – sur la route entre La Posterle et Corps – via le col de la Samblue. Je suis passé à l’époque avec un vieux Scenic mais j’avoue que j’ai préféré mon second passage en 2022 avec le Rav4. Ça reste néanmoins une piste assez large et très majoritairement saine. Arrêtez-vous bien au parking des 1550m, environ 1,5 km sous le col. Là-haut y’a les bestiaux et j’ai ouï dire que certains conducteurs, en rentrant de leur marche, avaient retrouvé leurs voitures bien amochées par les vaches qui s’étaient frottées dessus ! Anecdote à garder à l’esprit !

Recommandations & Topo : à l’instar de Garnesier, il se trouve que j’ai également consacré un article et une vidéo rien qu’à l’Obiou il y a de ça pas mal de temps déjà. Mais les informations qu’il contient sont toujours d’actualité, en tout cas concernant la difficulté, les conseils prodigués et l’itinéraire. Vous pourrez donc retrouver tout ça dans le guide pratique de l’article Une Ascension qui va Obiou des Choses. Oui j’ai une passion pour les mauvais jeux de mots je sais 🙂 Pour résumer en deux lignes : ne surestimez pas votre niveau, soyez à l’aise avec la sensation de vide, n’ayez pas peur de devoir mettre les mains et n’oubliez pas de prendre un casque ! Et pensez à prendre assez d’eau, vous n’en trouverez pas en cours de route !

Hébergement : comme pour le Pierroux ! C’est au Gîte de Saint-Disdier qu’il faudra frapper. Les infos sur le gîte sont donc dans la partie « Hébergement » du petit guide pratique du Pic Pierroux, ci-dessus, juste avant l’Obiou !

5 – LE PIC DE BURE (2709m)

Proposer une sélection de sommets du Dévoluy sans y caler le Pic de Bure ? Impossible ! Insultant même ! Défi pour les grimpeurs – son pilier Est est une classique pas si souvent répétée que ça – le Pic de Bure ne propose aucune approche simple pour les randonneurs. Il est même d’ailleurs une grande source de désillusion et de souffrance pour les vacanciers mal équipés et mal préparés qui en mésestiment la réelle difficulté. Une fois encore, il y a plusieurs manières d’en atteindre le sommet mais, pour cette sélection, c’est l’itinéraire de la Combe Ratin qui sera présenté.

Le Pic de Bure c’est l’iconique symbole du massif, celui qui apparaît fièrement sur le logo touristique du territoire. Une forme reconnaissable entre mille dans les Alpes du Sud.

Le départ se fait par les Vallons de Bure, au-dessus de la gare du téléphérique. Un endroit dont je vous avais déjà parlé dans Carnets de Rando dans l’article En Route Pour l’Avant Bure consacrés à ces magnifiques vallons. J’avance donc ici en terrain connu, le temps de remonter le vallon de Corne, sous la Traversée Héroïque et par l’intermédiaire du GR® de Pays qui fait le Tour du Dévoluy. Cap sur le collet desservant le vallon suivant, celui de l’Âne auquel je tournerai cette fois le dos pour poser les yeux sur la longue échancrure de la Ratin, domaine absolu du caillou et sacrée bavante de ce parcours. Le terrain n’est guère hospitalier, à moins d’être l’un des chamois peuplant l’endroit.

Bure
Le décor du départ dans le vallon de Corne. La Ratin se distingue en haut à gauche de la photo.

À la sortie de la Ratin, celui/celle dont c’est la première fois débarquera en pleine science-fiction : dominant le paysage lunaire du plateau, les paraboles géantes de l’IRAM propulse brutalement le visiteur sur une autre planète. Ce dispositif d’oreilles tournées vers l’espace est l’un des plus importants au monde. Il faudra s’arracher malgré tout à cette légitime stupéfaction pour se rappeler qu’il y a encore de la route pour rallier le sommet du Pic de Bure. Visible là-bas vers l’est, tout au bout d’une traversée du désert qui semblera interminable à certain(e)s. Là-haut, la vue est à la hauteur de l’effort et l’immensité révélée à tomber par terre.

Comme souvent dans le Dévoluy, savoir gérer un effort est indispensable pour éviter les coups de sape sévères du mental. Une bonne dose de volonté ne sera pas de trop pour venir à bout de la pente finale traître qui réclame son dû pour être vaincue.

Posté aux confins méridionaux du Dévoluy, le Pic de Bure ouvre sa large fenêtre sur le bassin du Gapençais que coiffent les sommets du Champsaur, d’un côté, du Parpaillon, de l’autre. Tout le massif des Monges est également exposé devant une ligne plus lointaine où se mêlent des cimes de l’Ubaye, du Haut Verdon et du Mercantour. Le sud est à nos pieds, parcouru par le sillon de la Durance qui s’en va rejoindre les Bouches-du-Rhône dans un flou indistinct. Pile dans l’axe, le synclinal de Céüse s’ouvre dans le paysage comme le Colisée à Rome. Une vue et une ascension impossible à oublier !

Pic de Bure – Infos Pratiques

Départ/Arrivée : parking de la Cabane de l’Avalanche

Difficulté : difficile | Distance : 15,5 km | Durée : 6h35 | Dénivelé : 1270m | Carte : IGN TOP 25 1/25000è 3337 OT – Dévoluy, Obiou, Pic de Bure

Topo : depuis le parking, suivre la piste en direction de la gare du téléphérique. À la sortie du Bois Rond, peu avant de passer sous la ligne haute tension, suivre à gauche le chemin indiquant la Combe Ratin via le GR® de Pays jaune et rouge (1). Le suivre jusqu’au col 2053 où s’opère la bascule vers le vallon d’Âne (2). Poursuivre par le GR® de Pays en direction de la Combe Ratin. La remonter entièrement jusqu’à déboucher sur le plateau avec le site de l’IRAM à main droite (3). S’écarter de la zone de l’IRAM pour traverser le plateau de Bure plein est en suivant des cairns et des balises GR® de Pays. Quand les balises dévalent à droite vers la Combe d’Aurouze (4), continuer tout droit par une trace évidente qui sinue en direction du sommet du Pic de Bure (5). Variante de retour : à la sortie de la Combe Ratin (2) basculer par le Vallon d’Âne pour suivre le sentier qui rejoint en direct le parking.

Recommandations spécifiques : Bure c’est long. Et peut-être plus que n’importe quel autre endroit du Dévoluy, ça exige un amour du caillou inconditionnel ! Parce que de la caillasse vous allez en avoir sous la semelle un paquet d’heures ! Autant être prévenu(e)s ! Techniquement pas de contre-indication particulière. En revanche, armez-vous d’un mental solide et d’une patience à toute épreuve pour arriver là-haut. Et n’oubliez pas d’emporter de l’eau car aucune oasis n’a encore été inaugurée là-haut.

Hébergement : pour Bure j’aurais tendance à vous envoyer au Gîte du Liéraver à Saint-Étienne-en-Dévoluy, chez Joëlle et Philippe. Un lieu doté d’une grosse identité rando et rompu à l’accueil des marcheurs. Dans la bonne humeur et la simplicité, l’étape au Liéraver contribue à prolonger l’expérience du Dévoluy avec des personnes qui le vivent à l’année. Le gîte dispose de 39 places réparties dans des chambres allant de 2 à 6 places et un dortoir de 8 places. La demi-pension est annoncée à 51,75 euros. Infos et réservation : 06 32 30 12 63 ou lieraver@wanadoo.fr

Dévoluy Pratique

Pour venir faire de la randonnée dans le Dévoluy

Depuis Gap

Depuis Gap, au sud, il faut suivre la direction verte Orange/Valence par la DD94. Peu avant Veynes, la D937 tourne à droite vers le Dévoluy via le Col du Festre. Possibilité, depuis la vallée du Rhône, de rejoindre Nyons (Vaucluse) puis, via les Gorges de Saint-May et Serres, de rallier Veynes – qu’on traverse direction Gap – pour prendre à gauche la fameuse D937 direction col du Festre. Poursuivre par la D17 et suivre la direction Superdévoluy jusqu’à Saint-Étienne-en-Dévoluy.

Depuis Grenoble

Depuis Grenoble, au nord, l’entrée principale sont les Gorges de la Souloise : après avoir quitté la N85 à l’entrée de Corps, la route D537 contourne le lac du Sautet au nord puis bascule plein sud par une route magnifique jusqu’à Saint-Disdier. Poursuivre jusqu’aux Étroits par la D537. À l’intersection du pont de la Souloise, monter à gauche, par la D17, direction Superdévoluy jusqu’à Saint-Étienne-en-Dévoluy.

Par le col du Noyer

Un col franchit la barrière orientale du Dévoluy : le col du Noyer. Beaucoup de GPS envoient les gens par-là. Sachez, avant de vous engager, que le col du Noyer est une route de montagne assez étroite sur la fin et, surtout, qu’il est fermé en hiver. Autrement, il s’attrape depuis la N85 – la Route Napoléon entre Gap et Grenoble – après avoir dépassé Saint-Bonnet-en-Champsaur, en tournant à gauche par la D17 direction Poligny, Villeneuve puis Le Noyer. De l’autre côté, on descend vers Saint-Étienne-en-Dévoluy.

SAISONNALITÉ

Hors anomalies climatiques, la période la plus favorable pour gravir les sommets du Dévoluy court entre mi-juin et mi-septembre. Avec une préférence pour le premier créneau, de mi-juin à mi-juillet. Si le Dévoluy n’est pas encore victime du tourisme de masse et tant mieux, vous serez peut-être cependant surpris du monde qu’on peut trouver en montant à Bure et à l’Obiou certains jours et, notamment, le week-end. Venir en semaine et/ou hors-saison sera à votre avantage pour éviter la foule. Ces questions d’affluence ne concernant pas Garnesier, le Pierroux et, dans une moindre mesure, le Grand Ferrand.

Dans la descente de la Tête de Garnesier, vue sur la Tête des Omans et le Plateau de Bure au fond à gauche

RECOMMANDATIONS GÉNÉRALES

L’eau : le Dévoluy est un sympathique gruyère, bien troué de partout. L’eau – à l’exception de la Souloise – a du mal à y rester. En général elle disparaît vite fait dans le sous-sol via les fameux chourums pour ressortir par un autre trou plus bas. Les lacs et les sources sont donc rares et l’eau d’autant plus précieuse. Partez toujours avec suffisamment d’eau. Comptez large : 2L minimum par personne pour ces ascensions longues et fatigantes.

Le soleil : on est dans les Alpes du Sud ici. Le soleil est souvent de la partie et, année après année, j’aurais même tendance à dire pour aller dans le sens de la tendance que ça chauffe de plus en plus et de plus en plus tôt. Ça signifie que, dans le sac à dos, on a la crème solaire. Et que, pour la tête, on a prévu chapeau ou casquette pour prévenir l’insolation. Une paire de lunettes de soleil ne sera pas de trop non plus.

La météo : on parle d’ascensions et de sommets dans ce dossier. Comme vous le savez probablement, les orages aiment les points hauts. Et plus ils sont marqués, plus ils aiment. Renseignez-vous en amont auprès des services météo locaux pour bien choisir le créneau de votre ascension. Les orages tombent de plus en plus tôt ces dernières années. Ne partez donc jamais tard. Et sachez faire demi-tour si le ciel se fait trop rapidement menaçant.

L’extraordinaire paysage qui se déploie au-dessus du col de l’Aup, dans l’ascension du Pic Pierroux

Lecture d’itinéraire : contrairement aux itinéraires faciles présentés dans le précédent dossier Premiers Pas en Randonnées dans le Dévoluy, ces cinq sommets nécessitent de savoir se débrouiller assez souvent sans balisage. Bien lire le terrain, faire correspondre les informations données dans les topos à l’itinéraire, guetter les marques et les cairns pour éviter de se mettre en difficulté dans les passages difficiles : tout ça vous devrez savoir le faire. Ou quelqu’un de votre groupe le devra. Question de sécurité.

Le matériel : si vous êtes arrivés sur cet article c’est probablement que vous taquinez déjà pas mal en montagne. Je me dis donc que je n’ai pas de conseils à vous donner pour vous aider à constituer un fond de sac adapté. Si cela était néanmoins nécessaire voici les essentiels à mettre dans votre, idéalement, 45L maximum : vêtement polaire, veste imperméable, protection de pluie pour le sac à dos, mini-guêtres pour limiter les cailloux dans les chaussures (surtout à la descente), casque (pour l’Obiou et le Grand Ferrand). Aux pieds ce sont des chaussures solides et stables, bien crantées. Cela peut être des basses, tant que vous ne les découvrez pas ce jour-là et qu’elles répondent aux critères précédemment cités. Bâtons ? Pourquoi pas mais ils vous gêneront dans les moments escarpés et il faudra les ranger. Petite trousse à bobos, couteau en complément pour la pause miam-miam.

Face à face avec la Tête de Plate Longue dans la descente du Grand Ferrand

Liens Utiles

Office de Tourisme du Dévoluy

Vous le trouverez à la sortie de Saint-Étienne-en-Dévoluy, sur la route de Superdévoluy. L’équipe de Muriel, la directrice, est un vrai gang d’amoureux/ses du territoire qui saura répondre à vos interrogations. Beaucoup de brochures, dépliants, cartes et autres éléments d’informations touristiques en lien avec la randonnée dans le Dévoluy à disposition sur place. Incontournable.

Être guidé

Vous sentez que vous avez la caisse mais affronter seul(e) les sommets du Dévoluy vous effraie ? Pas de souci. Les accompagnateurs du Dévoluy sont là ! Je peux vous recommander Marianna, notamment pour l’Obiou qu’elle connaît par cœur ! Férue de grimpe et de géologie, vous trouverez ses coordonnées sur son site ArtMontana.

Pour Garnesier, avec une approche faune sauvage, ce sera plutôt Baptiste Maltese – très calé sur la thématique du loup ! – alors que pour le côté plantes et flore locale, je vous dirais plutôt de prendre contact avec Luc Bernard qui m’avait accompagné pour le reportage dans les Vallons de Bure. Vous trouverez les coordonnées des deux sur le site de Vertical Zenith.

À noter que, de ces cinq propositions, seule celle du Pic de Bure par la Combe Ratin est disponible dans le topo-guide du Dévoluy disponible auprès de l’Office de Tourisme.

L’appel des Écrins depuis le sommet du Pic de Bure
Remarque : les informations données dans cet article engagent uniquement la responsabilité de l’utilisateur/rice sur le terrain qui saura les adapter à son niveau et à son expérience. Carnets de Rando ne saurait être tenu responsable de tout accident survenant suite à un mauvais usage de cet article ou à une mauvaise appréciation du niveau du/de la pratiquant(e) par rapport à celui requis.
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